Depuis son arrestation pour avoir orchestré un réseau pédocriminel et sa mort en détention le 10 août 2019, le nom de Jeffrey Epstein n’a cessé d’être associé à diverses théories complotistes. Dès l’annonce de son décès, l’idée selon laquelle « Epstein ne s’est pas suicidé » est devenue virale au sein des communautés d’extrême droite en ligne.
Derrière cette phrase se cristallise la théorie selon laquelle la justice n’a pas pu aller au bout de son travail, des forces puissantes et secrètes l’en ayant empêché pour protéger leurs intérêts inavouables. La thèse du suicide ne serait qu’un écran de fumée pratique, trop pratique même, pour étouffer la manifestation de la vérité : caméras (opportunément ?) défaillantes, geôle (délibérément ?) non surveillée, rapports médicaux (volontairement ?) contradictoires, etc. Dans cette version, tout est lié, rien n’arrive par hasard, tout n’est que mensonge et manipulation.
Il faut dire que derrière Epstein et sa « liste de clients » coupables de violences sexuelles – liste dont l’existence reste fantasmatique – on retrouve, dans les soirées organisées par le financier, des personnalités du monde politique, de la tech, du cinéma ou de la musique telles Bill Clinton, le prince Andrew, Bill Gates, Woody Allen, Michael Jackson (1958-2009)… et même Donald Trump. Quoi de mieux pour alimenter les spéculations les plus scabreuses sur un réseau d’élites pédocriminelles organisant sa propre impunité ? Ainsi se déploient dans l’affaire Epstein cette vision du monde et cette rhétorique typiques des discours complotistes et populistes binaires du « eux » contre « nous », de « l’autre menaçant » (élites, minorités, étrangers) contre le « peuple » bon et vertueux.
Ainsi, dès 2019, pour les sphères conspirationnistes de la droite alternative, pour les partisans de QAnon ou les fans de l’animateur Alex Jones, Epstein devient une nouvelle version du complot type contre l’Amérique authentique impliquant un réseau sataniste, Hollywood, l’Etat profond, la gauche libérale ou encore le Parti démocrate. En miroir, Trump est alors perçu comme le champion putatif de l’Amérique réelle, censé en restaurer les vraies valeurs : « Make America Great Again » (MAGA) !
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