L’arrestation au Bourget de Pavel Durov, le patron de Telegram, a mis les réseaux sociaux en ébullition.
La justice française lui reproche d’avoir couvert sur sa plateforme des activités criminelles.
Certains réseaux font circuler la fausse information que les Émirats arabes unis ont annulé une commande de Rafale pour sanctionner la France.
Une thèse qui séduit particulièrement les milieux libertariens, comme l’explique Samira El Gadir sur le plateau de TF1.
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L’info passée au crible des Vérificateurs
Les Émirats arabes unis auraient annulé une commande de 80 avions de combat Rafale à l’armateur Dassault, pour sanctionner la France, immédiatement après l’arrestation sur son sol de Pavel Durov, le fondateur de la messagerie cryptée Telegram. Ce contrat, signé en 2021, et qui fait depuis la fierté de l’industrie militaire française, tient pourtant toujours, et la commande doit bien être livrée en 2031.
Cependant, cette rumeur circule abondamment sur les réseaux sociaux, explique la journaliste Samira El Gadir, de l’équipe des Vérificateurs de TF1 et LCI, dans la vidéo ci-dessus. Les comptes qui la diffusent citent « Al Jazeera » comme source de l’information, en copiant l’habillage de la chaîne qatarie, laquelle nie en être à l’origine.
Une rumeur qui séduit les milieux libertariens
La méthode est connue, de détourner l’image des grands médias pour profiter de leur crédibilité, et les Vérificateurs ont déjà eu l’occasion de l’analyser. Mais cela n’empêche pas cette pratique de fonctionner : l’histoire de la fausse annulation de la commande de Rafale a cumulé plus de huit millions de vues.
Cette fois, note Samira El Gadir, outre les habituels réseaux conspirationnistes pro-russes, la rumeur a aussi beaucoup séduit dans les milieux libertariens. Attachés à une liberté d’expression « totale », ces internautes ont rapidement fait de Pavel Durov un symbole, voire un martyre de leur cause. Parmi les têtes d’affiche de ce courant, on note la présence de Robert Kennedy, neveu du président américain assassiné, libertarien assumé, mais aussi figure notable du mouvement antivax – et qui vient juste de se retirer de la course à la présidence américaine, au profit de Donald Trump.
Elon Musk, premier soutien de Durov
Mais Pavel Durov a d’abord été défendu par Elon Musk soi-même, le patron de X (ex-Twitter), qui compte plus d’abonnés qu’un chef d’État, et utilise abondamment son propre réseau social pour exprimer quasi quotidiennement ses opinions. La vidéo qu’il a mise en ligne, appelant à « libérer Pavel », a ainsi été vue plus de 42 millions de fois. Une rare argumentation sur X d’Emmanuel Macron pour rappeler l’indépendance de la Justice française laisse d’ailleurs à supposer que celui-ci réagissait avant tout à la sortie du milliardaire américain, désormais soutien affiché de Donald Trump.
Pour les tenants de cette liberté d’expression absolue, celle-ci ne doit comporter aucune limite, même lorsque l’on parle de terrorisme ou de pédocriminalité. Les lois nationales obligent pourtant les plateformes à collaborer avec les autorités, ce qui est précisément au cœur de l’accusation contre le patron de Telegram. Pavel Durov a en effet été mis en examen ce mercredi notamment pour « refus de communiquer les informations nécessaires aux interceptions autorisées par la loi » et « complicité de délits et de crimes » qui s’organisent sur la plateforme (trafic de stupéfiants, pédocriminalité, escroquerie et blanchiment en bande organisée). Le secret est le principe même de Telegram, qui a séduit près d’un milliard d’utilisateurs.