L’économiste Jean Pisani-Ferry affirme, dans Le Monde du 26 octobre, que nous sommes désormais confrontés à un choix cornélien : soit nous « imposer des sacrifices au nom du climat », soit y renoncer par facilité – à nos risques et périls, prévisibles et terribles.
Mais quels sacrifices au fait ? Manger mieux, moins carné et plus bio, en consommant beaucoup plus de nourriture produite dans un environnement proche, est-ce un sacrifice ? Diminuer le nombre et la longueur de nos déplacements quotidiens, grâce à la suppression de l’étalement urbain, est-ce douloureux ? Moins d’auto-boulot-dodo, est-ce désagréable ? Moins d’investissements dans les routes, les autoroutes, les voies rapides urbaines et les échangeurs routiers, n’est-ce pas économiser pour des choses plus plaisantes ?
Moins de voyages en avion, ce n’est embêtant que pour 2 % ou 3 % de la population, ce n’est pas dramatique en soi, cela ferait moins de dépenses en avions, en aérodromes, en kérosène et cela relocaliserait l’économie en limitant les échanges intercontinentaux de marchandises.
Une idée qui facilite l’écolobashing
Moins de terrains imperméabilisés, cela éviterait bien des catastrophes qui coûtent très cher humainement et financièrement : on peut y arriver grâce à un recentrage progressif, en tous quartiers habités, des emplois, des commerces, des équipements fâcheusement exilés en zones hyperspécialisées périphériques. Un urbanisme de proximité, est-ce dérangeant ? N’est-ce pas réalisable dès lors qu’on se donne une nouvelle ambition pour la ville ?
Ne jetons pas la pierre à Jean Pisani-Ferry. L’idée qu’un monde écologiquement soutenable passe par le renoncement à des tas de belles choses est largement répandue, y compris chez des écologistes patentés. C’est pourtant une idée très contestable qui tend à détourner nombre de citoyens de l’écologie et qui facilite l’écolobashing, lequel se veut depuis peu conquérant.
Il est donc urgent de présenter l’écologie autrement que sous des raccourcis simplificateurs, à savoir : coûts exorbitants, renoncements déplaisants, efforts incessants, bouleversements dérangeants. C’est à cette condition que, dans le débat politique, l’écologie sera prise au sérieux.
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