Adoptée à l’unanimité, mardi 3 septembre, une loi votée par le Parlement du Nicaragua va permettre de juger les opposants au régime du président Daniel Ortega vivant hors des frontières du pays, qu’ils soient nationaux ou étrangers.
Cette réforme du code pénal prévoit des peines allant jusqu’à trente ans de prison, avec une possible confiscation de biens, pour ceux qui encouragent les sanctions contre le gouvernement de Managua. Le texte, qui entrera en vigueur dès sa publication au Journal officiel, établit que les entreprises et les ONG peuvent également être sanctionnées.
La loi vise « à renforcer le travail des institutions de notre pays chargées de lutter contre le crime organisé transnational », a déclaré la députée pro-gouvernementale Maria Auxiliadora Martinez lors de la session du Parlement.
Pour l’opposition, principalement exilée au Costa Rica, aux Etats-Unis et en Espagne, elle vise à donner un cadre légal aux pratiques « répressives » du président Ortega. « Elle permet au régime de poursuivre n’importe qui, qu’il se trouve ou non au Nicaragua, et sans qu’il soit nécessaire qu’il soit présent au procès, consolidant ainsi un cadre juridique qui soutient ces pratiques répressives », a expliqué à l’Agence France-Presse l’ancien candidat à la présidence Felix Maradiaga, exilé aux Etats-Unis. Selon lui, M. Ortega entend ainsi « réduire au silence l’opposition partout dans le monde ».
Mise en garde de l’ONU
La loi a été adoptée le jour où l’ONU a mis en garde contre la « grave » détérioration des droits humains dans le pays depuis l’année dernière, avec une augmentation des détentions arbitraires et des persécutions à l’encontre de ceux « perçus comme des dissidents » par le gouvernement.
Après les avoir accusés de « trahison », le gouvernement du Nicaragua a libéré l’année dernière plus de 300 hommes politiques, journalistes, intellectuels et militants critiques, les a expulsés et privés de leur nationalité et de leurs biens.
Daniel Ortega, 78 ans, qui a gouverné dans les années 1980 après le triomphe de la révolution sandiniste, est revenu au pouvoir en 2007 et a été réélu lors de scrutins non reconnus par Washington, l’Union européenne et des organismes internationaux. L’ancien chef de guérilla est accusé d’avoir mis en place un régime autoritaire dans ce pays d’Amérique centrale de sept millions d’habitants.
En 2018, trois mois de manifestations contre son régime ont été durement réprimées, faisant plus de 300 morts, des centaines de détenus, et poussant à l’exil des milliers d’autres, selon l’ONU.