PSYCHOLOGIE – “J’ai été idiot, con de ne pas arrêter de fumer plus tôt.” Son cancer du poumon, Jean-Pierre Pernaut, décédé ce mercredi 2 mars, avait choisi de ne pas le cacher. Bien au contraire, l’ancien présentateur vedette du JT de TF1 préférait en parler pour informer et inviter, peut-être, d’autres fumeurs à faire attention.
“Au mois d’avril-mai, on m’a découvert une petite maladie qui arrive aux gens qui fument, qui font la connerie de fumer. Pendant des années, on m’a dit: ‘arrête de fumer, arrête de fumer, arrête de fumer’. J’ai fumé beaucoup. Et puis on m’a trouvé un petit cancer du poumon. C’est la première fois que j’en parle”, confiait-il en novembre dernier.
Tous ne prennent pas ce chemin. Certains -c’était par exemple le cas du créateur Virgil Abloh- préfèrent ne pas rendre public leur combat contre la maladie.
Que l’on s’appelle Virgil Abloh ou Jean-Pierre Pernaut, que l’on soit célèbre ou inconnu, l’annonce d’une telle maladie à son entourage, proche ou moins proche, est un moment qui n’est jamais simple, et pour lequel il n’existe pas de formule magique. “Souffrir d’une maladie chronique comme le cancer relève de l’ordre de l’intimité, de la souffrance physique et morale. Cette intimité, certains ont envie de la préserver, quand d’autres ont besoin ou envie de la rendre publique”, explique au HuffPost le docteur Ophélie Soulie, psychiatre à l’institut Curie de Paris.
De fait, pour cette spécialiste en psycho-oncologie, il existe “tout autant de réponses ou de manières de gérer la maladie que de malades eux-mêmes. Chacun fait comme il peut, avec les ressources qu’il a”.
Certains gardent privée cette information. S’ouvrir sur la maladie, partager cette difficulté auprès de ses proches, peut être très douloureux. “Le dire rend réelle l’angoisse que génère la maladie. À partir du moment où vous partagez cette information, l’idée d’être malade, de pouvoir en mourir, est mise en exergue. Ce qui est douloureux, c’est la prise de conscience de cette réalité”, poursuit-elle.
Garder la maladie pour soi est aussi une manière de vouloir continuer à vivre, et le montrer, au-delà de la maladie. “Quand on a du mal à parler de ce que l’on vit, cela peut-être parce qu’on en a peur, mais aussi pour garder une forme de stabilité, des repères, dans un moment de chaos”, explique Ophélie Soulie. À ce moment-là, on peut ne pas avoir envie de se montrer uniquement à travers le filtre de sa maladie, de garder la maîtrise de l’image que l’on renvoie”.
En même temps, ce partage peut aussi être source de soulagement. En trouvant du soutien dans la sphère familiale, ou dans la sphère professionnelle, par exemple. “Pourquoi informe-t-on ses proches?”, interrogeait Sarah Dauchy, alors psychiatre à l’institut Gustave Roussy, centre de soins, de recherche et d’enseignement prenant en charge les patients atteints de cancer, contactée par Le Meridien à l’occasion de la sortie du film Juste la fin du monde, de Xavier Dolan. “Est-ce par besoin de partager et recherche de soutien, ou par devoir d’informer, voire de préparer à la perte?”, poursuit-elle.
Dans le cas de Jean-Pierre Pernaut, “cette idée de partage, en rendant la maladie publique, permet de transmettre certaines informations”, suppose-t-elle. À ce sujet, l’ancien présentateur a lui-même fait part de sa volonté d’informer, d’inviter ceux qui le souhaitent et le peuvent à arrêter le tabac. “Je ne suis pas devenu un ayatollah de l’antitabagisme, mais je fais partie des gens qui n’ont pas fait suffisamment attention aux mises en garde qu’on me lançait. J’ai été idiot, con de ne pas arrêter de fumer plus tôt. S’il y a deux personnes qui arrêtent parce que j’en parle, j’ai gagné.”
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