A elle seule, l’industrie a représenté, en 2023, près d’un cinquième (17,5 %) des émissions totales de gaz à effet de serre (GES) en France, soit le troisième secteur de l’économie le plus contributeur après les transports et l’agriculture. Quant aux cinquante sites industriels les plus polluants, hors raffineries – principalement des aciéries, des cimenteries et des usines chimiques – , ils représentent 7,3 % des émissions de GES. Des mesures établies par le Citepa, l’opérateur d’Etat qui réalise chaque année pour le ministère de la transition écologique le décompte des émissions dans l’ensemble du pays.
C’est dire si la décarbonation de l’industrie est indispensable pour que la France parvienne à la neutralité carbone à l’horizon 2050. D’autant que, si l’industrie doit décarboner ses modes de production, elle joue également un rôle-clé en fabriquant les biens (panneaux solaires, batteries électriques, électrolyseurs, pompes à chaleur, etc.) qui participent à cette évolution dans les autres secteurs de l’économie.
Le pays serait sur la bonne voie si l’on observe la baisse de 7,8 % des émissions de GES d’origine industrielle entre 2022 et 2023. L’industrie serait même l’un des secteurs économiques qui a le plus réduit ses émissions en France. Sauf que cette baisse est trompeuse car, dans le détail, elle repose pour moitié sur la chute de la production durant cette période, notamment de ciment et d’acier. Ces deux productions ont pâti du coût élevé de l’énergie à cause de l’inflation, du ralentissement du secteur du bâtiment et de la concurrence asiatique, notamment chinoise et indienne. Moins de production égale moins d’émissions, mais pas forcément plus de décarbonation dans les faits.
« Economie circulaire et la sobriété »
Les associations Réseau Action Climat (RAC) et France Nature Environnement (FNE) ont étudié la réalité de la décarbonation industrielle française, en faisant le bilan, rendu public mardi 16 juillet, des actions menées en 2023 par les cinquante sites les plus émetteurs de CO2. Depuis novembre 2022, ces sites – principalement situés dans les bassins industriels de Dunkerque (Nord), du Havre (Seine-Maritime), de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) et du Grand Est – ont élaboré avec l’Etat leurs trajectoires de réduction des émissions de carbone. Une planification qui a débouché sur la signature, en novembre 2023, de « contrats de transition » qui visent, entre autres, à « réduire de 45 % les émissions de GES en 2030 ».
Pour RAC et FNE, l’industrie fait face à une « difficile mutation » et « doit encore prouver que sa décarbonation est engagée et pérenne ». Les deux associations déplorent notamment « le manque de transparence » sur le contenu précis des contrats de transition, qui n’ont pas de caractère contraignant et ne comportent ni obligation de résultat ni sanction en cas d’objectifs non atteints. Elles s’inquiètent également d’une forme de déni face aux enjeux alors que « l’effort à venir pour respecter les objectifs climat pour 2030 et 2050 va requérir une mutation digne d’une révolution industrielle ». La planification du gouvernement prévoit ainsi que l’industrie réduise ses émissions de GES « de 36,5 % entre 2023 et 2030 ».
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