La famille a attendu le dernier moment pour partir. « On ne voulait pas quitter notre maison, mais avec les bombardements, c’est devenu impossible de rester », raconte Stas Gabelyuk, 30 ans. Cet agriculteur ukrainien et sa femme, Victoria, ont été évacués avec leurs trois enfants, samedi 21 septembre, du village de Dachne, près de Pokrovsk. Cette ville stratégique de la région ukrainienne de Donetsk est le théâtre d’intenses combats depuis juillet. Elle menace désormais de tomber aux mains des Russes, qui ne sont plus qu’à 7 kilomètres.

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La famille Gabelyuk a été évacuée vers Pavlohrad, à une heure trente de Pokrovsk. Cette petite ville de la région de Dnipro abrite depuis le 13 août un centre de transit pour les civils fuyant l’avancée des Russes dans le Donbass. En six semaines, plus de 1 800 personnes y ont été prises en charge, avant d’être redirigées vers d’autres villes, jugées plus sûres, et capables d’absorber ces nouveaux arrivants.

Le rythme des arrivées ralentit peu à peu, mais les évacuations se poursuivent pour sauver les civils. Quelque 15 000 habitants sont toujours à Pokrovsk, contre 60 000 avant l’invasion russe, en février 2022, selon Katerina Yanzhula, porte-parole de l’administration de la ville. Les villages alentour, eux, ne comptent plus que 24 000 personnes en tout, contre 80 000 auparavant.

L’espoir d’un « miracle »

« Quand ils arrivent ici, les gens sont stressés, effrayés et désorientés, explique Alina Kudriavska, membre de l’ONG Relief Coordination Centre, chargée d’accueillir les déplacés à Pavlohrad. Ils ont perdu leur maison et ne savent pas où aller. Mais ils sont contents d’avoir de nouveau accès à l’eau, à l’électricité et à Internet, et d’être dans un endroit calme, sans bombardements. »

Le matin même, pourtant, un missile est tombé sur Pavlohrad. « Ces attaques sont devenues plus fréquentes depuis qu’on a installé le centre de transit, remarque la bénévole. Le bâtiment peut être une cible. » Par précaution, les mesures de sécurité ont été renforcées : la police nationale vérifie le profil de chaque personne jugée suspecte, et quand de nouveaux déplacés arrivent, les bénévoles éteignent leurs téléphones pour ne pas être détectés, et éviter que la foule soit prise pour cible.

Un résident  devant l’entrée d’une école transformée en centre d’accueil temporaire pour les déplacés fuyant le Donbass. Pavlohrad, Ukraine, le 23 septembre 2024.

A la nuit tombée, dimanche 22 septembre, quelques volontaires s’affairent encore dans la tente humanitaire dressée à côté du centre de transit. Deux militaires, boisson énergétique à la main, passent non loin. Ils reviennent de Pokrovsk. L’humeur est sombre. « Franchement, je ne sais pas comment l’Ukraine va pouvoir s’en sortir », lâche l’un d’eux, dont l’identité n’est pas révélée pour des raisons de sécurité. Quand il est retourné à Pokrovsk, la veille, il a été pris en chasse par un drone kamikaze. « Il était juste au-dessus de ma tête. J’ai levé les yeux vers lui. C’était terrifiant. Il a décrit un cercle, et il est parti frapper à 100 mètres d’ici, sur une zone d’habitations. Ça a fait une énorme explosion. » Il secoue la tête : « J’espère qu’il n’y avait plus d’êtres humains là-bas. » Désabusé, ce soldat se dit « sûr à 100 % que Pokrovsk va tomber aux mains des Russes avant la fin de l’année », et espère un « miracle » pour que l’armée ukrainienne puisse reprendre l’avantage.

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