L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER
Sélectionné en compétition officielle du Festival du film d’animation d’Annecy, en juin, Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau a fait l’unanimité auprès du public, dont une grande partie n’a pu retenir ses larmes. Celles-ci relevaient moins d’un sentiment de tristesse que d’un trop-plein d’émotions accumulées durant une heure trente. Nombreux furent les festivaliers qui, dès lors, et malgré la rude concurrence des autres films en lice, n’en démordirent pas : Flow était destiné à recevoir la plus haute récompense, le Cristal du long-métrage. Lequel est finalement allé au superbe Memoir of a Snail, du réalisateur australien Adam Elliot. Flow, pour sa part, loin de repartir bredouille, a obtenu trois prix : celui du jury, celui du public et celui de la Fondation Gan pour le cinéma. Un mois plus tôt, présenté dans la catégorie Un certain regard, le film avait conquis Cannes.
C’est à une histoire sans paroles ni commentaires que nous convie le jeune réalisateur letton Gints Zilbalodis, 30 ans, dont le précédent long-métrage – son premier –, Ailleurs (2020), déjà repéré et couronné du prix Contrechamp à Annecy, avait aussi adopté ce parti pris pour rapporter le périple d’un jeune garçon parachuté sur une île mystérieuse, après un accident d’avion. Cette fois, toute trace humaine a disparu. La nature a (re)pris le dessus qui, hélas, risque à son tour d’être engloutie par la menaçante montée des fleuves, des rivières et des océans. Dans ce monde postapocalyptique, un chat noir aux yeux jaunes immenses a élu domicile dans une maison vide. Parmi ses voisins, toutes sortes de bêtes domestiques et sauvages vont et viennent, occupées à trouver de la nourriture. Guère sociable, le chat garde ses distances.
Le déluge approchant, le félin, que l’eau rebute au plus haut point, décide de prendre les voiles avant qu’il ne soit trop tard. Et trouve refuge sur un bateau de fortune où ne tarderont pas à le rejoindre d’autres animaux, eux aussi effrayés par les inondations : un capybara narcoleptique, un lémurien cleptomane, un labrador joueur en quête de compagnie et un échassier au caractère solitaire. Sur l’embarcation aux airs d’arche de Noé, chacun s’est octroyé un emplacement précis, dont la défense exige une attention de tous les instants. La méfiance est de mise, qui oblige à ne pas quitter l’autre du regard, donc à observer ses attitudes, ses rituels, ses manies. Ce qui ne va pas sans susciter curiosité et étonnement, chacun considérant les différences de l’autre comme autant d’étrangetés jugées incongrues, voire ridicules.
Il vous reste 45.51% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.