CANAL+ – MERCREDI 25 SEPTEMBRE À 21 HEURES – DOCUMENTAIRE
Le 26 avril 2019, un béluga pas comme les autres était repéré dans le nord de la Norvège : il portait un harnais et allait spontanément au contact des humains. Ce harnachement et sa sociabilité, combinés à la zone géostratégique où il évoluait, font qu’il a aussitôt été soupçonné, plus ou moins sérieusement, d’être un espion échappé d’une base maritime russe.
Dès lors, médias, anonymes, associations et réseaux sociaux s’approprient le mammifère, baptisé Hvaldimir – contraction de « hval », « baleine » en norvégien, et de « Vladimir », prénom de Poutine. Parmi eux, le Français Fabrice Schnöller, ingénieur de formation. Résidant à La Réunion, il s’était découvert une passion pour le « langage » utilisé par les dauphins et les cachalots, organisant des expéditions pour les filmer et les enregistrer.
Lorsqu’il apprend l’existence de Hvaldimir, Fabrice Schnöller se persuade que ce béluga peut être « la pierre de Rosette de la communication des cétacés », car plus facilement accessible qu’un cachalot ou une baleine. Ainsi commence leur aventure commune, ponctuée de rencontres poétiques, et relatée dans le documentaire qu’il coréalise.
Egalement de la partie, le biologiste marin Sebastian Strand est le premier à évoquer les dangers, pour un tel mammifère marin, d’une trop grande promiscuité avec les humains. Alors qu’une vidéo, virale, fait affluer toujours plus de curieux – celle qui montre Hvaldimir plongeant pour rapporter un téléphone tombé à l’eau.
Quête du « fantastique »
En dépit de l’omniprésence de Fabrice Schnöller, qui commente les images face caméra depuis sa bibliothèque, on se laisse emporter, dans une large première moitié du film, par la magie des paysages, par la scène du béluga jouant au ballon, par la quête énoncée du « fantastique, dans un monde qui n’en comporte plus tant que ça ». Avec indulgence pour les anthropomorphismes récurrents. La bouille de Hvaldimir et le soleil de minuit sur les îles Lofoten emportent tout.
Après le premier hiver, Hvaldimir est à nouveau retrouvé près de parcs à saumons. Ce que les éleveurs n’apprécient guère, dans un des derniers pays à autoriser la pêche à la baleine. Des ONG envisagent alors de le mettre en sécurité dans un parc marin. Mais Fabrice Schnöller désapprouve, fidèle à ses principes de respect « de la liberté et du libre arbitre ».
Lorsque, après la césure imposée par le Covid-19, le chercheur repart en mer à la recherche de Hvaldimir, il emmène sa fille Morgane, qui partage désormais sa passion. Elle intègre les expéditions et le film, commentant elle aussi les images, depuis sa chambre. Ils vont retrouver le béluga, enregistrer ses sons, ses vocalises même, ce qui les transporte de joie. A l’écran, le béluga suit leur bateau, qui s’éloigne. Pourquoi sont-ils partis ?
Sans que les observateurs comprennent pourquoi, Hvaldimir a ensuite descendu les côtes norvégiennes. Egaré toujours plus au sud, il a été identifié, amaigri, en juin 2023, puis retrouvé mort le 31 août dans la baie de Risavika. Le film étant terminé, la réalisation devait ajouter une incise, que nous n’avons pas pu visionner. Le 4 septembre, deux associations ont porté plainte, affirmant que l’animal avait été tué par balle. La police locale a démenti cinq jours plus tard. Hvaldimir est mort, incompris.
#hvaldimir. La véritable histoire du béluga espion, documentaire de Jérôme Delafosse et Fabrice Schnöller (Fr., 2023, 89 min). Disponible à la demande sur MyCanal.