Le premier ministre israélien a décidé. Près de onze mois après les massacres de civils israéliens par le Hamas, l’éradication du mouvement terroriste demeure sa priorité. Pas la libération des dizaines d’otages capturés le 7 octobre 2023 et encore retenus dans la bande de Gaza. Au lendemain de la découverte par l’armée israélienne, le 1er septembre, des corps de six d’entre eux, exécutés par leurs geôliers, selon les autorités israéliennes, alors que leurs soldats s’approchaient du tunnel dans lequel ils étaient détenus près de Rafah, Benyamin Nétanyahou est resté ferme, insensible aux protestations que son intransigeance suscite dans l’opinion israélienne.
Il exige ainsi le maintien du contrôle par Israël des quelques kilomètres de frontière qui séparent Gaza de l’Egypte. Cette surenchère est à l’origine d’une vive altercation entre le premier ministre et son ministre de la défense, Yoav Gallant, quelques jours avant la découverte des six corps. Le ministre et le chef d’état-major s’y opposaient en effet, sachant qu’elle est inacceptable pour la milice islamiste, afin de laisser une chance à un accord de cessez-le-feu permettant la libération des otages israéliens en échange de celle de prisonniers palestiniens.
La posture du premier ministre rend illusoires dans l’immédiat les interminables tractations pour parvenir à un arrêt des combats dans une bande de terre transformée en enfer par le pilonnage israélien. Le président des Etats-Unis, Joe Biden, qui a usé en pure perte un considérable crédit pour tenter d’infléchir la position de Benyamin Nétanyahou, n’a pu que dresser le constat, le 2 septembre, que ce dernier n’en faisait pas assez pour parvenir à un accord.
Fermer la porte des négociations revient pourtant à exposer les otages israéliens aux plus grands périls. Il n’y a en effet rien à attendre du Hamas et de la spirale mortifère dans laquelle il s’est enferré, qui minent dramatiquement les légitimes aspirations palestiniennes. Les prises d’otages du 7 octobre 2023, et l’atroce chantage auquel elles donnent lieu depuis, font partie des crimes de guerre qui ont achevé de discréditer le mouvement terroriste. Un porte-parole de la milice a d’ailleurs assuré que ces otages reviendraient « dans des cercueils » si l’Etat hébreu maintenait sa pression militaire.
Il est difficile de voir dans le maximalisme du premier ministre israélien, toujours incapable d’esquisser la moindre vision pour Gaza une fois que les armes se seront enfin tues, autre chose que le souci de maintenir soudée la coalition gouvernementale la plus radicale de l’histoire d’Israël. Ne serait-ce que pour éviter de rendre des comptes pour la tragédie du 7 octobre. Ses alliés d’extrême droite, Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir, sont en effet viscéralement opposés au moindre accord de cessez-le-feu à Gaza, quel que soit le prix payé par les otages.
Les mots d’ordre de ces dangereux provocateurs prônant l’annexion des territoires occupés et l’expulsion des Palestiniens sont pourtant la garantie de la perpétuation du conflit, comme la Cisjordanie occupée en est le théâtre toujours plus alarmant. Il faut saluer, dans ce contexte désespérant, la décision du gouvernement britannique de suspendre en partie ses ventes d’armes à l’Etat hébreu. Symbolique, cette mesure constitue néanmoins une mise en garde contre ses propres impasses que la coalition au pouvoir en Israël aurait tort de balayer d’un revers de la main.