« Dans mon rêve, c’est grandiose, noir de monde, ça crie, ça chante et enfin je réalise cet objectif complètement dingue. J’espère qu’il deviendra réalité, mais comme je suis un grand rêveur, je m’autorise tout. » Lundi 2 septembre, Alexis Hanquinquant a concrétisé le songe d’une nuit d’été, cette scène qu’il avait tant de fois visualisée, hanté depuis trois ans par les Jeux paralympiques de Paris. Drapeau bleu, blanc, rouge à bout de bras, le triathlète de 38 ans a savouré son moment, seul au monde en franchissant le pont Alexandre-III, la tour Eiffel à sa gauche et au fond de ce décor majestueux, les feuilles d’or du dôme des Invalides.
Déjà sacré à Tokyo en 2021, le désormais double champion paralympique a vécu le « scénario parfait. J’étais sur un petit nuage aujourd’hui et ça a volé de A à Z », a-t-il imagé, après ses 58 min 01 s d’effort – le meilleur temps, toutes catégories confondues. Sorti de la Seine en tête après 750 m de crawl, le Normand a creusé l’écart lors des 20 km à vélo sur les redoutables pavés parisiens pour finalement couper le ruban au terme des 5 km à pied avec plus de deux minutes d’avance sur l’Américain Carson Clough et plus de trois sur l’Espagnol Nil Riudavets Victory.
Invaincu depuis 2019, le sextuple champion du monde était le grandissime favori à sa propre succession en PTS4 (catégorie debout, handicap modéré). Mais le porte-drapeau de la délégation française récuse l’idée que les Jeux étaient faits. « Ce n’était pas gagné d’avance, insiste l’ancien maçon, amputé de la jambe droite après un accident du travail. A chaque course, tous mes adversaires veulent me détrôner, c’est un travail de longue haleine. Tous les jours il faut se remettre en question et aller au charbon. »
Ces dernières semaines, il a poussé le perfectionnisme jusqu’à se confronter au stress climatique (sous « thermo room », une salle reproduisant la chaleur et l’humidité) et psychologique à l’entraînement. Le but ? « Qu’il se dise : il ne peut rien m’arriver le jour J », raconte Nicolas Pouleau, son coach. Ainsi, sur son home-trainer, Alexis Hanquinquant a dû pédaler en visionnant la vidéo de l’épreuve test à l’été 2023 tout en comptant, au milieu des cris du public, le nombre de gilets jaune sur le parcours ou de lampadaires sur le pont. « J’avais à cœur de montrer l’exemple en tant que porte-drapeau, ça aurait été un peu bête de ne pas ramener de médaille. C’est chose faite », a conclu le chef de file de l’armada bleue du triathlon (17 athlètes et 4 guides).
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