Superbe actuellement en fin de nuit dans l’hémisphère Sud, cette comète devrait être visible dans le ciel crépusculaire en Europe après le 11 octobre.
Pour le moment, ce sont les observateurs de l’hémisphère Sud qui profitent de la splendeur de la comète C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS. Au Chili, en Namibie ou en Australie, par exemple, son noyau se lève à l’orée de l’aube et ses queues de gaz et de poussières mesurent plus de dix degrés – l’équivalent de la largeur du poing bras tendu – sur les photographies. En Europe, et plus largement dans l’hémisphère Nord, C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS se lève près d’une heure avant le Soleil depuis fin septembre et pour encore quelques matins et son éclat est donc particulièrement délicat à repérer au ras de l’horizon est dans un ciel déjà clair et coloré. Le 29 septembre à l’aube, en prenant l’image qui ouvre ce billet, je ne la voyais pas à l’œil nu, mais son noyau et l’amorce de sa queue étaient visibles aux jumelles avec un grossissement d’une dizaine de fois.
Aux latitudes européennes, les choses sérieuses devraient commencer après le 11 octobre lorsque cette comète surgira dans le ciel crépusculaire et que son éclat apparent aura bénéficié de deux circonstances très favorables : d’une part, depuis son passage au plus près du Soleil (périhélie) le 27 septembre dernier – à 58 millions de kilomètres –, cette comète circule sur une trajectoire qui la rapproche chaque jour un peu plus de notre planète, qu’elle croisera le 12 octobre à 71 millions de kilomètres, et son éclat apparent devrait donc continuer de croître même si son activité diminue au fur et à mesure qu’elle s’éloigne du Soleil ; d’autre part, le 9 octobre, C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS passera pratiquement entre le Soleil et la Terre et cette disposition très particulière pourrait augmenter considérablement son éclat apparent car toute la matière dispersée par le noyau lors de son récent passage au périhélie sera révélée par le rétroéclairage solaire.
L’astronome américain Joseph N. Marcus, spécialiste du rétroéclairage des comètes (voir son article sur le sujet), estime que l’éclat apparent de la comète C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS pourrait être multiplié par cent entre le 7 et le 11 octobre et par plusieurs centaines de fois dans la journée du 9 octobre, jour où elle pourrait atteindre une magnitude comprise entre – 4 et – 5, équivalente à celle de Vénus. Cette forte augmentation apparente de son éclat pourrait alors permettre un repérage bien plus facile de la comète dans le ciel crépusculaire aux latitudes européennes après le 10 octobre. L’astrophotographe français Nicolas Lefaudeux a réalisé une simulation de l’évolution possible de l’aspect de C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS en tenant compte des toutes dernières observations et je vous invite à consulter son site pour découvrir son travail remarquable.
Avec toutes les précautions nécessaires, les observateurs chevronnés pourront tenter de repérer C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS en plein jour le 9 octobre, à moins de quatre degrés du Soleil ; j’ai réalisé une telle observation le 13 janvier 2007 avec la comète C/2006 P1 McNaught dont l’éclat avait également été fortement accru par le rétroéclairage solaire. Il sera possible de surveiller l’augmentation apparente de l’éclat de C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS en suivant son passage entre le 7 et le 11 octobre dans le champ du coronographe LASCO C3, l’un des instruments de la sonde spatiale européenne SOHO. Les images de cet instrument qui permet d’observer la périphérie du Soleil en cachant son disque éblouissant sont accessibles librement en ligne sur ce site.
Après sa conjonction solaire du 9 octobre, la comète C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS va très rapidement s’éloigner de la position apparente du Soleil et sa trajectoire dans le ciel du soir sera parfaite pour les observateurs de l’hémisphère Nord. Si l’effet de rétroéclairage marche à plein et que son éclat apparent est aussi intense qu’espéré par les astronomes, il devrait être possible de la photographier moins d’une heure après le coucher du Soleil dès le vendredi 11 octobre au ras d’un horizon ouest parfaitement dégagé. Le samedi 12 octobre, elle se couchera un peu moins d’une heure et demie après le Soleil et son repérage aux jumelles et à l’œil nu devrait être possible si vous faites l’effort de prendre un peu d’altitude pour bénéficier d’un horizon plus transparent. À partir du 14 octobre, le noyau de cette comète se couchera de plus en plus tard après la fin du crépuscule et il apparaîtra donc dans un ciel plus sombre si vous vous éloignez des sources de pollution lumineuse qui dégradent la noirceur de la nuit. L’éclat de la Lune croissante sera gênant pendant quelques soirs, mais la portion la plus lumineuse de la queue de C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS devrait être visible à l’œil nu et aux jumelles et absolument splendide photographiquement.
Naturellement, toutes les bonnes choses ont une fin et l’éclat de cette comète va décroître sensiblement avant la fin du mois d’octobre, mais dans les sites offrant un ciel bien protégé des lumières artificielles C/2023 A3 Tsuchinshan-ATLAS devrait embellir les nuits des observateurs et des photographes durant tout l’automne. Quant à savoir si elle sera la « comète du siècle » seul l’avenir nous le dira !
À lire également Chaque mois, je vous propose de découvrir mes images du ciel dans ma Lettre du Guide du Ciel.
Quelques rendez-vous à admirer dans le ciel d’octobre
Phases de la Lune en octobre La Lune est nouvelle le 2 dans la Vierge, au premier quartier le 10 dans le Sagittaire, pleine le 17 dans les Poissons et au dernier quartier le 24 dans le Cancer.
Le ciel en octobre Lorsqu’il fait beau, le mois d’octobre est l’un des plus agréables pour observer la Voie lactée. Le Scorpion est perdu corps et biens, mais il reste toute la bande qui va du Sagittaire au Cygne en passant par Ophiuchus, l’Écu, l’Aigle et la Lyre – sans parler des figures minuscules du Petit Renard et de la Flèche, glissées entre Altaïr et Albiréo. Dès la fin du crépuscule, soit de plus en plus tôt avec le rallongement de la nuit, l’arche galactique s’élève à l’aplomb de l’horizon sud-ouest en direction du zénith. S’asseoir dans une chaise longue et se promener dans cette région avec des jumelles est un pur délice tant elle fourmille d’amas, de nébuleuses et de beaux regroupements stellaires. Le Verseau, les Poissons et la Baleine ne sont pas riches en étoiles brillantes et il est ardu de les dessiner dans un ciel éclairé par la Lune gibbeuse ou par une pollution lumineuse trop forte. Quant à Fomalhaut, très proche de l’horizon sud-est, c’est souvent la seule étoile visible dans la constellation du Poisson austral. Il faut remonter au-dessus de l’horizon est et nord-est pour parcourir à nouveau une voûte céleste bien garnie. Le carré de Pégase, Andromède, Cassiopée et Persée délimitent un pays séduisant au sein duquel il faut, là aussi, vagabonder aux jumelles par une nuit bien sombre pour apprécier les amas, les nébuleuses et les galaxies qu’il recèle. Au bout de l’arc de Persée, le petit groupe des Pléiades nous signale l’arrivée du ciel d’hiver, qui profite des longues nuits pour s’installer et qui surplombe l’horizon sud à l’orée de l’aube. Cette année, Saturne est bien installée dans le ciel en début de nuit ; elle est rejointe un peu plus tard par Jupiter, puis Mars.