Encore un instant, monsieur le bourreau. Les constructeurs automobiles européens, à l’exception de Stellantis, supplient la Commission européenne de leur accorder un petit délai avant l’application des nouvelles normes sur les voitures thermiques et demandent un plan d’urgence. En cause, la faiblesse des ventes de véhicules électriques, qui se sont effondrées, notamment en Allemagne et en France, dès la suppression des subventions à l’achat.
La Chine a le problème inverse. Elle ne vend plus assez de voitures à moteur thermique, alors que les ventes d’hybrides et d’électriques continuent leur croissance en dépit de la baisse des aides. En août, les ventes de voitures électriques ont dépassé celles de véhicules à essence, pour représenter 54 % du marché, dépassant le cap du million de voitures en un mois. En miroir, le marché des bonnes vieilles voitures thermiques s’est effondré de 28 %. Une décroissance bien plus rapide que prévu qui provoque la fermeture d’usines sur tout le territoire.
Le New York Times raconte le sort de l’usine flambant neuve installée, en 2017, par le Coréen Hyundai, dans la mégapole de Chongqing, au centre du pays. Un investissement de 1,1 milliard de dollars (1 milliard d’euros) dans un lieu aujourd’hui en friche et vendu à la découpe pour une bouchée de pain. En 2017, il s’était vendu 28,3 millions de voitures à essence. En 2023, il ne s’en est plus écoulé que 17,7 millions. En conséquence, l’appareil industriel du pays, taillé pour 40 millions de véhicules, est largement surdimensionné. L’agence Bloomberg assure que Volkswagen devrait prochainement fermer l’usine commune avec son partenaire, Shanghai Automotive Industry Corporation, qui produit des Passat à Nankin. D’autres pourraient suivre puisqu’elles ne sont utilisées, selon Bloomberg, qu’à 58 % de leur capacité.
Faire suivre les infrastructures
La Chine est ainsi le premier grand pays à avoir passé son pic pétrolier dans le domaine automobile, à une vitesse stupéfiante, même si les zones rurales résistent faute d’infrastructure. Et cela en dépit du ralentissement des ventes de l’électrique, après la fin des aides à l’achat. Il est donc possible, à grande échelle, d’opérer cette transition rapidement, si l’infrastructure et les produits suivent. Le phénomène devrait s’accélérer, puisque les voitures électriques sont en train de devenir moins chères que leurs équivalents thermiques. Le nouveau géant du secteur, BYD, vend des modèles à moins de 10 000 dollars.
Un chemin existe donc pour les Européens. Mais le retard entre les deux régions du monde s’accroît encore avec le ralentissement en Europe, où la gestion du déclin du moteur thermique reste aléatoire et contestée. Des taxes douanières ne suffiront pas à éloigner le spectre des fermetures d’usines.