Les chiffres, les faits, le discours et le droit : voilà quatre clés pour tenter de comprendre les tensions actuelles traversant la politique migratoire allemande.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’Allemagne est une terre d’asile. Elle a accueilli 1,4 million d’immigrés syriens en 2015 et presque autant d’Ukrainiens par la suite. En 2023, elle reste le premier pays européen en matière d’enregistrement de demandes d’asile (plus de 350 000, soit plus du double de la France), avec une augmentation de 50 % par rapport à l’année précédente.

Les faits sont déjà d’une interprétation plus délicate. En 2015, le slogan « Wir schaffen das » (« Nous y arriverons ! ») de la chancelière Angela Merkel avait révélé aux yeux du monde que l’Allemagne assumait une politique d’ouverture et d’accueil envers les étrangers meurtris par la guerre et qu’elle était une puissance suffisamment forte pour « y arriver ».

En politique intérieure et au sein de sa propre coalition, le slogan a cependant toujours été controversé. Par la suite, les agressions sexuelles commises par des étrangers, notamment à Cologne, lors du Nouvel An 2016, ont eu un écho retentissant auprès de la population. Ce tournant devait permettre au parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne de sortir de son insignifiance et de devenir une force politique de premier plan dans les nouveaux Länder.

Mesures sécuritaires

Dans la période récente, des événements comme l’attaque au couteau perpétrée par un Syrien, qui a fait trois morts le 23 août à Solingen, sont instrumentalisés au service des agendas politiques. Même s’il ne s’agit statistiquement que de quelques cas, leur écho est désormais tel qu’ils ne peuvent plus être traités politiquement comme des faits divers certes tragiques, mais isolés.

Le discours a, dès lors, nettement évolué. Les partis du gouvernement de coalition (socialistes, Verts et libéraux) sont encore plus sous pression à la suite des élections régionales de septembre. Pour la première fois depuis la fin de la seconde guerre mondiale, l’extrême droite est arrivée en tête des suffrages en Thuringe, tandis que les chrétiens-démocrates l’ont été en Saxe, ce qui constitue autant de revers pour le gouvernement actuel, à un an des élections législatives.

Dans ce contexte, et quand bien même les citoyens sont descendus en masse dans la rue en 2024 pour manifester contre l’extrême droite, le discours de la fermeté – et, partant, celui de la fermeture – l’emporte. Un « paquet » de mesures sécuritaires a été annoncé et présenté par le ministère fédéral de l’intérieur en réponse immédiate à l’attentat de Solingen, parmi lesquelles la réduction des migrations irrégulières.

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