L’orage était prévisible. Il a éclaté lundi soir avec l’annonce par Volkswagen de possibles fermetures d’usines en Allemagne. Un choc culturel profond pour le pays qui place depuis plus d’un siècle l’industrie au cœur de son modèle social. Et ce n’est pas fini.
Le sidérurgiste Thyssen prépare une restructuration massive et, selon l’agence Reuters, l’électronicien américain Intel devrait présenter d’ici quelques semaines à son conseil d’administration un plan d’économies qui pourrait se traduire par le gel ou l’abandon de son gigantesque projet d’usine à Dresde (Saxe). Un investissement de près de 30 milliards d’euros, dont 10 milliards de subventions, pour produire des puces de dernière génération.
L’Allemagne est au cœur de cette tempête car elle est le centre névralgique de l’industrie européenne, mais l’alerte est partout. Dans l’automobile, le groupe Stellantis fait face à la colère du gouvernement italien depuis l’annonce, en juin, de la suspension de la création d’une usine de batteries à Termoli, dans le sud du pays. Partout les industriels replient la toile depuis plusieurs mois devant les nuages qui s’amoncellent.
Immatriculations en baisse
Les causes sont connues et trouvent leur source dans le désordre mondial issu des crises sanitaires et géopolitiques de ces dernières années. L’emballement de la sortie de pandémie a provoqué une inflation mondiale combattue par une remontée des taux d’intérêt. Ceux-ci ont perfusé dans l’économie jusqu’à atteindre la demande. Mais ils ont aussi abîmé les budgets des Etats et leurs marges de manœuvre. Ainsi, le marché automobile a stoppé sa croissance, y compris dans le secteur de la voiture électrique. En août, les immatriculations ont baissé de 24 % en France, par rapport à un mois d’août 2023 particulièrement vigoureux. Mais, en juillet, les ventes de voitures électriques ont baissé de 37 % en juillet en Allemagne suite à l’arrêt brutal des subventions à l’achat.
A cette chute de la demande s’ajoutent des coûts en hausse et une concurrence chinoise exacerbée. Les prix de l’énergie se sont calmés, mais ils ne sont pas revenus à la période d’avant la crise du gaz et la fin des livraisons russes, notamment en Allemagne dont une bonne partie de la compétitivité industrielle en était dépendante. Surtout dans un contexte de transition énergétique qui nécessite de lourds investissements.
Sans oublier, enfin, la pression chinoise, constatée avec l’arrivée de cargos entiers de voitures électriques, mais aussi par le flux ininterrompu de batteries, d’acier et de toutes sortes de produits et composants à prix cassé que la faible consommation chinoise ne peut pas absorber. L’orage actuel passera peut-être plus vite que prévu, mais personne ne sait à quoi ressemblera le paysage qu’il laissera derrière lui.