C’est une histoire dont Le Canard enchaîné aurait volontiers fait ses choux gras, s’il n’en avait été le personnage principal. Mardi 8 octobre devrait s’ouvrir au tribunal judiciaire de Paris le procès dit « de l’emploi fictif » que les patrons de l’hebdomadaire satirique ont accordé à Edith Vandendaele, l’épouse du dessinateur André Escaro, entre 1996 et 2022.
L’ancien président de la SAS Les Editions Maréchal Le Canard enchaîné Michel Gaillard, son directeur, Nicolas Brimo, et l’ancien illustrateur, tous trois anciens administrateurs de la société, ainsi que l’épouse de ce dernier comparaissent pour des faits d’« abus de biens sociaux, recel d’abus de biens sociaux, obtention frauduleuse de la carte de presse, déclaration mensongère en vue d’obtenir un avantage indu et faux en écritures privées ».
Agé de 96 ans, l’auteur des « cabochons », des dessins de la taille d’une vignette, qui illustraient la page 2 du journal jusqu’au 18 mai 2022, et Nicolas Brimo, 73 ans, souffrent de problèmes de santé, qui justifient, pour leurs avocats, leur demande de renvoi du procès.
Des revues de presse
L’ouverture de l’enquête, au printemps 2022, a valu à la brigade financière, saisie par le parquet de Paris à la suite d’une plainte contre X pour « abus de biens sociaux et recel d’abus de biens sociaux » déposée par le journaliste du Canard Christophe Nobili, d’assister à un défilé des plus pittoresques. Les uns après les autres, des journalistes de l’hebdomadaire, retraités ou en activité, des dessinateurs, une secrétaire, une comptable, etc., se sont succédé devant les policiers qui souhaitaient établir si, oui ou non, ils avaient déjà vu Mme Vandendaele dans les locaux du 173, rue Saint-Honoré, dans le 1er arrondissement de Paris. Assistait-elle aux conférences de rédaction ? Disposait-elle d’un poste de travail ? Quelle était la nature de son activité ? La nature même de leurs questions montre que le doute était permis.
Si des témoignages convergent pour admettre que Mme Vandendaele s’assurait d’un coup de fil, chaque mardi, que les dessins, qu’elle envoyait par fax ou par mail, étaient bien arrivés à la rédaction, la direction du Canard affirme, de son côté, comme elle l’a écrit en une le 30 août 2022, qu’elle assistait son époux, en lisant la presse pour lui ou en réalisant des revues de presse susceptibles de l’inspirer. Pour M. Escaro, entré au journal en 1949, sa compagne lui apportait « une contribution morale et technique », selon le rapport d’enquête consulté par Le Monde ; elle-même a précisé aux enquêteurs « que son travail d’assistance était “immatériel” ».
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