Le président de la BBC a envoyé, jeudi 13 novembre, à Donald Trump une « lettre personnelle » d’excuses, mais le géant des médias britanniques a aussi réfuté toute « base légale » à une plainte en diffamation après la diffusion d’un montage trompeur d’un discours du président américain.
Ces excuses interviennent à la veille de l’expiration d’un ultimatum lancé par les avocats de Donald Trump, qui avaient menacé par courrier, dimanche, d’attaquer en justice et de réclamer 1 milliard de dollars (860 millions d’euros) de dommages au groupe audiovisuel britannique s’il ne s’excusait pas.
La BBC, véritable institution au Royaume-Uni, est dans la tourmente depuis la récente révélation que son magazine phare d’information « Panorama » a diffusé, juste avant la présidentielle américaine de 2024, des extraits distincts d’un discours de Donald Trump – il a été prononcé à Washington, le 6 janvier 2021 – montés de telle façon qu’il semble appeler explicitement ses partisans à attaquer le Capitole.
L’affaire a poussé dimanche à la démission le directeur général de la BBC, Tim Davie, et la patronne de BBC News, Deborah Turness. Le président du conseil d’administration du diffuseur public, Samir Shah, a reconnu le lendemain une « erreur de jugement » dans une lettre au Parlement britannique, mais sans présenter d’excuses à Donald Trump.
Ultimatum
Le président américain et ses avocats avaient donné jusqu’à vendredi, 23 heures (heure de Paris) à la BBC pour s’excuser et retirer le documentaire incluant le montage incriminé.
Dans un bref communiqué, cette dernière a fait savoir, jeudi soir, que Samir Shah avait « envoyé une lettre personnelle à la Maison Blanche pour dire clairement à Donald Trump que lui et l’entreprise sont désolés » pour le montage de son discours. Le groupe britannique indique également que ses avocats ont écrit à ceux du président américain, sans cependant dévoiler le contenu de ce courrier.
« Si la BBC regrette sincèrement la manière dont ces images ont été montées, nous contestons fermement qu’il y ait une base légale pour une plainte en diffamation », fait-il toutefois valoir. Il ajoute que le documentaire de « Panorama » intitulé « Trump : A second Chance » (« Trump : une deuxième chance ») ne sera plus rediffusé sur une chaîne ou plateforme du groupe.
Le président américain, qui a multiplié les menaces et les actions en justice contre des médias américains, avait qualifié les journalistes de la BBC d’être « corrompus » et « malhonnêtes », avant de lancer son ultimatum.
Pression politique et médiatique
Le premier ministre britannique, Keir Starmer, bien qu’interpellé sur le sujet, avait refusé, mercredi, de commenter publiquement cette menace d’attaque en justice. Il avait simplement promis de « toujours défendre une BBC forte et indépendante », tout en estimant qu’elle devait « mettre de l’ordre dans ses affaires », « respecter les standards [de qualité] les plus élevés » et « corriger rapidement les erreurs ». « A l’ère de la désinformation, l’argument en faveur d’un service d’information britannique impartial est plus fort que jamais », avait-il insisté.
La BBC a par ailleurs dit, jeudi, examiner un deuxième cas de possible montage trompeur du même discours de Donald Trump, dans un autre programme phare de la chaîne diffusé en 2022, soit deux ans avant la diffusion de l’émission « Panorama ». « Ce problème a été porté à notre attention et nous menons actuellement une enquête », a réagi un porte-parole de la BBC, après un article du Telegraph, jeudi, sur ce cas.
La controverse a soulevé un vif débat au Royaume-Uni sur le fonctionnement de la BBC et son impartialité, alors que le groupe a déjà été bousculé ces dernières années par plusieurs polémiques et scandales.
Le mois dernier, elle a encore été épinglée par le régulateur britannique des médias pour avoir « enfreint les règles de diffusion » avec un reportage à Gaza dans lequel le narrateur principal, un enfant, était le fils d’un haut responsable du mouvement islamiste palestinien Hamas, sans que ce lien de parenté ne soit signifié au spectateur.









