FREDERICK FLORIN / AFP
Raphaël Glucksmann photographié dans l’hémicycle du Parlement européen (illustration)
POLITIQUE – Le résultat du vote ne souffre d’aucune contestation possible. Avec 500 voix pour, 20 votes contre et 24 abstentions, le Parlement européen a adopté ce jeudi 19 octobre une résolution « sur les attaques terroristes abjectes du Hamas contre Israël, le droit d’Israël de se défendre conformément au droit humanitaire et international et la situation humanitaire à Gaza ». Dit autrement : la première position commune exprimée par les eurodéputés sur la crise au Proche-Orient.
Un pas symbolique important qui a immédiatement été salué par l’eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann, dans une publication sur X (ex-Twitter). « La résolution votée aujourd’hui au Parlement européen montre qu’on peut condamner dans les termes les plus forts les terroristes du Hamas et les massacres du 7 octobre 2023 et demander le respect du droit international, la levée du siège de Gaza ou l’aide aux civils palestiniens », a affirmé celui qui est pressenti pour conduire la liste du PS aux élections européennes, concédant dans un autre message que cette résolution « n’est pas parfaite et peut être critiquée ».

« Nous avons une boussole »
Pour autant, le même considère que l’essentiel est là, puisque la résolution permet selon lui « d’éviter le gouffre de la négation de l’humanité de l’autre ». Ce qui a fait bondir Jean-Luc Mélenchon et ses fidèles. « Donc refuser de demander le cessez-le-feu, refuser le couloir humanitaire, refuser la levée du blocus, c’est ce que le PS de Glucksmann appelle une claire condamnation des crimes. Aux européennesn chacun devra s’en souvenir », a fustigé sur le même réseau social le chef de file de la France insoumise, friand des règlements de compte politiques en public.
Une attaque à laquelle Raphaël Glucksmann a sèchement répondu : « Mal tombé, nous avons voté pour un cessez-le-feu humanitaire, le couloir et la levée du blocus. Mais nous ne bégayons pas, nous, pour qualifier d’organisation terroriste le Hamas. Nous avons une boussole ». En effet, comme l’a souligné la porte-parole du PS Chloé Ridel, les eurodéputés socialistes et écologistes ont voté un amendement « pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza », qui a été rejeté. L’information est même disponible sur le compte Twitter de l’eurodéputée insoumise Manon Aubry, par ailleurs présidente du groupe de la gauche au Parlement européen. Mais alors, qu’est-ce qui vaut à Raphaël Glucksmann l’ire de Jean-Luc Mélenchon ?
Pour avoir la réponse, il faut se plonger dans la résolution, approuvée par le PS et EELV. Non seulement celle-ci condamne bien l’action « terroriste » du Hamas (qualificatif que persiste à refuser l’état-major de LFI) mais elle ne comporte pas le terme « cessez-le-feu » ni ne condamne explicitement les actions militaires menées par Israël en territoire palestinien.

« Pause humanitaire »
Sur ce point, l’article numéro 11 de la résolution « appelle à une pause humanitaire, à une désescalade et au plein respect du droit humanitaire international ; rappelle qu’il est indispensable de trouver une solution pacifique au conflit ; souligne que les attaques contre la population civile, y compris le personnel des Nations unies, le personnel médical et les journalistes, et contre les infrastructures civiles constituent une grave violation du droit international ». Ce qui, pour les insoumis, constitue une formulation trop timide au regard de l’urgence de la situation.
Une analyse que ne partage pas (du tout) l’eurodéputé EELV David Cormand. Pris à partie par plusieurs parlementaires mélenchonistes sur X, l’élu écolo a répondu du tac au tac : « Décidément, vous autres, à LFI, vous êtes doués pour faire de la sémantique avec le sang des autres… Une “pause humanitaire” est de fait un cessez-le-feu. Cette formulation, refusée par les USA à ce stade, permet à l’UE de peser pour que les armes se taisent. Sans vous… ». Sur le même réseau, la cheffe du parti écolo Marine Tondelier a répliqué sans ménagement au député LFI Paul Vannier qui s’en prenait également David Cormand. « Le drame qui se joue en ce moment vaut tellement mieux ce que tu es en train d’essayer d’en faire. J’ai honte », a-t-elle répondu, avant d’aller sur le fond : « La “pause humanitaire” c’est le minimum vital, refusé par les USA. Elle sauverait des vies. Vous avez voté contre. Ne venez pas nous donner des leçons ».
Détail intéressant, tous dans le groupe où siège LFI n’ont pas voté contre la résolution qui fait pourtant bondir les insoumis. Bien au contraire : plusieurs eurodéputés siégeant dans le groupe présidé par Manon Aubry ont même voté pour cette résolution, dont le cofondateur du parti Gauche Républicaine et Socialiste Emmanuel Maurel que LFI présente comme l’un de ses eurodéputés sur son site (bien qu’il s’agisse en réalité d’un accord électoral). Étrangement, ce dernier n’a pas eu droit à un tweet courroucé de Jean-Luc Mélenchon.
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