- La chanteuse espagnole casse tous les codes avec « Lux », déjà présenté ici et là comme l’album de l’année, sinon plus.
- Un opéra en 13 langues qui fusionne les genres musicaux pour rendre hommage à un Panthéon d’icônes féministes.
- TF1info vous raconte la métamorphose de son auteure, de nouvelle reine du flamenco à pop star ultime.
La musique a-t-elle perdu sa faculté à rassembler les peuples, par-delà les continents et les cultures ? À l’heure où les algorithmes nous isolent chaque jour un peu plus les uns des autres, Rosalía compte bien nous en libérer avec Lux
, un opéra pop en 13 langues sur lequel la chanteuse espagnole de 33 ans fusionne les genres musicaux comme personne pour rendre hommage aux icônes féminines de son Panthéon personnel. La Sainte catholique Hildegarde de Bingen, la poétesse musulmane Rabia al Adawiyya, la romancière brésilienne d’origine ukrainienne Clarice Lispector, la philosophe française Simone Weil ou encore la rockeuse américaine Patti Smith. C’est beau, c’est fou… et c’est déjà incontournable.
Si vous avez manqué le début, Rosalía Vila Tobella est la fille aînée d’une businesswoman
catalane qui fabriquait des plaques d’immatriculation et roulait en Harley Davidson pendant que la niña
se passionnait pour le flamenco. Adolescente, cette dernière chante dans les bars et les mariages, en parallèle de ses études de musicologie avant d’être recalée à un célèbre télécrochet à l’âge de 15 ans. Pas découragée pour un sou, elle multiplie les collaborations et rencontre un premier succès avec « Antes de morirme », un duo avec son ex, le rappeur C. Tanaga. Entre temps, sa maman bikeuse est devenue sa manageuse et sa sœur aînée sa styliste et directrice artistique. Une affaire de famille qui roule.
L’intelligence artificielle ? Très peu pour elle !
En 2016, Rosalía se lance enfin en solo et enregistre le très beau Los Angeles
avec le guitariste et compositeur Raul Refree, un disque qui participe du renouveau d’une tradition musicale qu’elle affectionne tant. Mais c’est deux ans plus tard qu’elle explose sur la scène internationale avec El Mal Querer
, pimenté par des sonorités hip-hop et une esthétique street qui détonne comme dans le clip de « Malamente ».
Couvertes de louanges, l’enfant prodige expérimente encore davantage en 2022 avec Motomami
, à coups de reggaeton et d’electro, le savoureux « La Fama » en duo avec The Weeknd en prime. Là encore, les récompenses pleuvent. Mais pas question de se reposer sur ses lauriers.
Fruit de trois ans de travail acharné, Lux
est une nouvelle métamorphose dans le parcours de Rosalía. La plus radicale et la plus ambitieuse à la fois. Construit en quatre actes, l’album a été enregistré entre Londres, Los Angeles, Barcelone, Séville et Saint-Rémy de Provence avec une armada de producteurs et de compositeurs, invités à canaliser l’énergie créative de la patronne. En interview, la chanteuse s’amuse à rappeler qu’elle a laissé l’intelligence artificielle aux imposteurs. Mais elle reconnaît s’être aidée de GoogleTranslate et d’une poignée de « traducteurs » pour capturer la note juste à l’image de notre Charlotte Gainsbourg nationale sur le langoureux « Jeanne », chanté dans la langue de Molière.
Illuminé par les musiciens du London Symphony Orchestra, Lux
est une fresque tantôt intimiste, tantôt grandiose, qui stimule sans cesse l’attention de l’auditeur à l’image du premier single, l’ébouriffant « Berghain », sur lequel sont conviés la diva islandaise Björk et le chanteur rock américain Yves Tumor. Le point commun à chacun des 18 titres, c’est le timbre captivant d’une diva qui n’a pas son pareil pour nous chuchoter à l’oreille… avant de nous transpercer le cœur à la meilleure occasion. Sur les réseaux sociaux, un débat fait rage au sujet de l’appartenance ou non de cet album hors norme à la musique classique. Qu’importe, puisqu’il s’agit peut-être déjà d’un classique de la musique.

