Deux mois après l’annulation de l’élection présidentielle où il était arrivé en tête au premier tour, le candidat d’extrême droite roumain Calin Georgescu a été inculpé pour « fausses déclarations » sur les sources de financement de sa campagne électorale, mercredi 26 février. « Le procureur a ordonné l’ouverture de poursuites pénales », a fait savoir le parquet de Bucarest dans un communiqué, sans nommer M. Georgescu, une source judiciaire confirmant par la suite à l’Agence France-Presse qu’il s’agissait bien de lui.
Calin Georgescu est inculpé au titre de nombreuses infractions présumées, au-delà des fausses déclarations sur le financement de sa campagne et sur son patrimoine. Parmi celles-ci figurent également « l’incitation à des actions anticonstitutionnelles », « la communication de fausses informations », « l’organisation de groupe raciste » et « l’apologie de crime de guerre ».
Ses partisans se sont rassemblés mercredi devant les locaux du parquet pour protester. A sa sortie d’audition dans la soirée, M. Georgescu a fustigé un « système corrompu à l’agonie », dont « l’initiative désespérée » de l’inculper a été décidée « avec Bruxelles ». Il a dit compter sur le soutien des Etats-Unis de Donald Trump.
Nombreuses perquisitions
Plus tôt dans la journée, il avait été interpellé par la police alors qu’il était en voiture et a été conduit sous escorte au bureau du procureur général pour être interrogé. « Calin Georgescu était sur le point de déposer sa nouvelle candidature à la présidence », avait écrit son équipe dans un message sur Facebook. « Ils essaient d’inventer des preuves pour justifier le vol des élections et font tout ce qu’ils peuvent pour bloquer une nouvelle candidature présidentielle de ma part », a écrit M. Georgescu sur Facebook.
Placé sous contrôle judiciaire, selon une source judiciaire à l’Agence France-Presse, il a désormais les obligations suivantes : il ne doit pas quitter la Roumanie, ne peut pas utiliser ses comptes sur les réseaux sociaux ni porter une arme et devra pointer régulièrement auprès de la police. Les autorités ont par ailleurs perquisitionné des dizaines de locaux dans la matinée, selon un communiqué du parquet, invoquant des infractions présumées, telles, donc, que des fausses déclarations sur les financements de campagne. Elles recherchent également des éléments de preuve pour atteinte à l’ordre constitutionnel, détention d’armes, troubles à l’ordre public, création d’une organisation raciste et apologie de crimes de guerre.
La Cour constitutionnelle roumaine avait annulé le scrutin en décembre 2024 en invoquant de « multiples irrégularités et violations de la loi électorale ayant faussé » le vote. Les autorités roumaines accusaient M. Georgescu, 62 ans, d’avoir bénéficié d’une campagne de soutien illicite sur la plateforme TikTok. La Commission européenne avait annoncé dans la foulée l’ouverture d’une enquête contre le réseau social chinois. « Nous devons protéger nos démocraties de toute forme d’ingérence étrangère », avait prévenu la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.
Le candidat d’extrême droite avait alors dénoncé « un coup d’Etat » et ses partisans sont descendus massivement dans la rue au début de janvier pour dénoncer un « vote volé ». Mais le 21 janvier, la Cour européenne des droits de l’homme avait rejeté la requête du candidat prorusse, déposée au nom du droit à des élections libres.
Nouvelles élections en mai
L’annulation du scrutin a créé un choc en Roumanie, où le pouvoir a déclassifié des documents des services de renseignement étayant les accusations sur le rôle de TikTok dans la campagne, avec la Russie dans le viseur. « Un candidat a illégalement bénéficié d’une promotion passive et a déclaré zéro euro de dépenses, avait dénoncé le président sortant, le pro-européen Klaus Iohannis. Sa campagne a, en outre, été soutenue par un Etat étranger. Il s’agit de choses graves. »
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Début janvier, le gouvernement roumain a fixé au mois de mai les dates de la nouvelle élection présidentielle. Le premier tour aura lieu le 4 mai et un second tour, le 18 mai, si aucun candidat ne remporte plus de la moitié des suffrages.
Soutien de M. Georgescu, le milliardaire Elon Musk, le chef du département de l’efficacité gouvernementale aux Etats-Unis, a écrit sur son réseau social X que « la personne » qui avait « recueilli le plus de voix à l’élection » venait d’être « arrêtée ». « C’est n’importe quoi », a-t-il tranché. Il avait déjà à plusieurs reprises pris position pour lui ces dernières semaines.
Dans le camp de M. Georgescu, l’autre figure nationale de l’extrême droite roumaine, George Simion, a réclamé des Roumains qu’ils ne « restent pas les bras croisés » devant ce « coup d’Etat » et affluent devant les locaux du parquet.
L’inculpation a fait dire au premier ministre social-démocrate roumain, Marcel Ciolacu, sur X, que dans l’actuel contexte électoral la justice a « le devoir de présenter au public des preuves extrêmement solides », un « candidat potentiel » étant « impliqué ».