• Les Insoumis sont vent debout contre les nouvelles règles sur les découverts bancaires.
  • Certains détracteurs les accusent pourtant d’avoir voté en faveur du texte à Bruxelles.
  • Les Vérificateurs démêlent le vrai du faux.

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L’info passée au crible des Vérificateurs

Pour eux, c’est le « scandale absolu » de cette fin d’année. Depuis le jeudi 30 octobre, les élus de la France insoumise se mobilisent contre ce qu’ils décrivent comme « l’interdiction des découverts bancaires », si bien qu’une pétition a même été lancée sur la plateforme Change.org (nouvelle fenêtre). « Cette privation a été imposée par l’Europe », s’est même indigné le fondateur du parti, Jean-Luc Mélenchon. Mais si les Insoumis dénoncent une « loi de misère », certains les accusent d’avoir en réalité voté en faveur de ce texte lorsqu’il était présenté au Parlement européen. Alors, les Insoumis sont-ils en campagne contre une mesure qu’ils ont eux-mêmes votée ? Nous avons vérifié.

Une directive adoptée avec les Insoumis

Tout d’abord, le patron du parti a raison de tourner les yeux vers Bruxelles. C’est effectivement là que commence l’affaire. Face aux nouvelles pratiques des utilisateurs – et notamment la « numérisation » du secteur des prêts – la Commission européenne décide en 2020 de se pencher sur les « crédits aux consommateurs »

Après une série de consultations publiques, l’obtention d’une expertise et une analyse d’impact, la Commission rédige une proposition de directive composée de 50 articles (nouvelle fenêtre)

Parmi ces articles, certains viennent encadrer ce que Bruxelles appelle la « facilité de découvert », considérée comme un « contrat de crédit explicite en vertu duquel un prêteur permet au consommateur de disposer de fonds qui dépassent le solde du compte courant du consommateur ». Dès lors, non seulement le texte introduit des dispositions visant à mieux informer le consommateur – comme l’obligation de le tenir « régulièrement informé de certains aspects de leur facilité de découvert », mais il vient aussi demander aux prêteurs de « procéder à une évaluation de la solvabilité du consommateur (nouvelle fenêtre)« .

Des dispositions que l’on retrouve dans la version finale (nouvelle fenêtre) de cette directive européenne, adoptée en commission et soumise au Parlement européen le 12 septembre 2023. Scrutin dont on retrouve le détail sur la plateforme HowTheyVote.eu (nouvelle fenêtre), qui compile les données de vote provenant de toutes les sources officielles. Or, sur les 79 élus français ayant participé au vote, la quasi-totalité (73) ont voté en faveur de cette directive, dont les Insoumises Manon Aubry, Leïla Chaibi et Marina Mesure. Un vote assumé, puisque Manon Aubry s’en expliquait même sur son site (nouvelle fenêtre). Elle arguait alors que cette directive permettait un « encadrement de la publicité pour être transparent sur les conditions de crédit » et se félicitait du « renforcement des obligations en matière d’évaluation de la solvabilité des demandeurs ».

La totalité des eurodéputés Insoumis – comme la très grande majorité des élus français – se sont donc prononcés en faveur de cette directive. Mais qu’en est-il de sa transposition dans le droit français ? Comme le prévoient les traités de l’UE, chaque État membre doit adapter ce type d’acte juridique (nouvelle fenêtre)à son droit interne, sous peine d’être sanctionné par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour manquement. Dans ce cas de figure, les Vingt-Sept ont jusqu’au 25 novembre 2025 pour l’adopter. 

Une transposition en France avec des modifications

C’est le processus entamé par la France dès octobre 2024. D’abord par un projet de loi présenté en Conseil des ministres. Or, comme pour toute directive, le texte a été rédigé et modifié pour s’adapter au droit et au contexte national. Paris y fait notamment figurer une nouvelle disposition, en introduisant un seuil précis à partir duquel le découvert est considéré comme un crédit, établi à 200 euros. Comme nous l’expliquons dans cet article (nouvelle fenêtre), cela signifie que concrètement, pour les découverts allant au-delà de cette somme, la banque aura l’obligation d’étudier la solvabilité du client avant de lui accorder ce découvert… et débloquer les agios considérables qui viennent remplacer les taux d’intérêts. 

Le texte adopté par les Insoumis à Strasbourg n’est donc pas exactement celui proposé par le gouvernement. Une version renforcée contre laquelle, cette fois-ci, les députés Insoumis se sont bien opposés. À l’Assemblée nationale, le groupe a déposé un amendement (nouvelle fenêtre) le 17 janvier pour refuser la transposition de la directive à la manière dont le souhaitait le gouvernement. Principal argument : précisément « l’évaluation de la solvabilité » prévue dans la version française. La directive a finalement été transposée par ordonnance le 3 septembre dernier, grâce aux seuls votes de la majorité présidentielle (nouvelle fenêtre), du groupe LIOT et des Républicains.

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Felicia SIDERIS

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