A 85 mètres d’altitude, les skieurs s’élancent sur la piste, décrivant des virages d’abord hésitants avant de profiter de la glisse. Mis à part le matériel de montagne, rien n’est commun dans l’expérience. Ni l’image : les usagers, en tee-shirt et short, fendent un maillage en plastique vert, contournant des arbres mais aussi des tuyaux d’où s’échappent des fumerolles. L’alignement des tire-fesses se juxtapose avec celui des éoliennes au loin. Ni le son : le raclement des skis et des snowboards se mêle au chant des oiseaux ainsi qu’au sifflement sourd de la centrale. CopenHill est un concept unique au monde : une piste de ski de 465 mètres de longueur installée sur le toit d’une imposante usine produisant de l’énergie à partir de déchets en plein cœur de Copenhague, au Danemark. L’un des symboles du combat de la ville pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES).

La capitale danoise a longtemps été pionnière dans la lutte contre la crise climatique. Dès 2009, elle s’est fixé comme objectif d’être neutre en carbone en 2025, c’est-à-dire de ne pas rejeter plus de CO2 que les puits naturels, comme les arbres, ne peuvent en absorber. A l’époque, le projet est radical, presque révolutionnaire. Aucune autre ville ni même pays ne vise, à ce moment-là, le « net zéro » à une échéance aussi rapprochée. Paris ne s’est dotée d’une telle cible qu’en 2018 et la France en 2019, à chaque fois à l’horizon 2050. « En 2009, alors que Copenhague accueillait la COP15 sur le climat, la municipalité a voulu participer pour faire quelque chose de remarquable. Le premier plan climat, adopté en 2012, a été vu comme extrêmement ambitieux », raconte Line Barfod, l’une des sept maires de la ville, chargée des affaires techniques et environnementales, dans une commune dominée par des partis de gauche.

Copenhague a parcouru une grande partie du chemin, mais elle ne parviendra pas à son but. Du moins pas en 2025. « Cela m’a déçue, mais on a presque atteint notre objectif. On espère y arriver bientôt, peut-être en 2026, 2027 ou 2028 », déclare-t-elle. Tout dépendra d’une aide de l’Etat que la ville espère décrocher pour permettre à l’incinérateur de CopenHill, l’Amager Bakke, géré par l’entreprise publique Amager Resource Center, de capter et de stocker ses émissions de CO2.

L’eau du port et du bras de mer qui sépare la ville en deux est dépolluée depuis 2002. A Copenhague, le 26 juin 2024.

L’enjeu est de taille et dépasse de loin les 660 000 habitants de la capitale, ou même les 5,8 millions de Danois. Les villes abritent aujourd’hui plus de la moitié de l’humanité – elles en accueilleront les trois quarts en 2050 – et sont responsables d’environ 70 % des émissions de GES. Trouver des solutions pour décarboner les transports, les bâtiments, les systèmes de production d’énergie, la consommation de nourriture et les déchets est crucial afin de limiter le réchauffement et d’éviter ses pires effets, des canicules aux inondations.

Il vous reste 86.64% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version