Dans les couloirs de la maison d’arrêt de Strasbourg, l’odeur de javel n’éclipse pas la vétusté du bâtiment de cinq étages aux couleurs fanées, construit en 1988, au bord de l’autoroute. Ici, fin juin, un détenu aveugle est mort dans l’incendie de sa cellule. Un drame qui a suscité une rare mobilisation d’une trentaine de personnes, le 5 juillet, venues manifester leur mécontentement devant l’établissement.

Mercredi 16 juillet, deux députés du Bas-Rhin, Louise Morel (Mouvement démocrate, MoDem) et Emmanuel Fernandes (La France insoumise, LFI), ont visité l’établissement, comme le leur permet la loi. Ce dernier a convié des journalistes de plusieurs titres, dont Le Monde. Une plongée dans l’ordinaire des détenus : plafonds éventrés dans certaines douches, cellules où l’absence de cloison empêche l’intimité dans les sanitaires, ou dont l’œilleton extérieur ne permet pas aux surveillants de contrôler tout l’intérieur. Ce dernier problème, facteur d’insécurité pour les détenus, est remonté régulièrement par la direction de l’établissement à l’administration pénitentiaire.

La surpopulation est au cœur des inquiétudes. Le quartier homme est occupé à 180 %. Même si la directrice se montre satisfaite d’un désengorgement ces derniers mois : « Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas été aussi peu remplis, nous sommes parfois montés jusqu’à 770 détenus pour 432 places », explique Audrey Revil. Aménagements de peine, transferts et dialogue avec les autorités judiciaires locales ont permis ce désengorgement, selon elle. D’après les syndicats du personnel pénitentiaire, le déficit de surveillants – une vingtaine environ – accentue aussi les difficultés.

Une « culture des signalements »

La maison d’arrêt accueille en ce moment entre 720 et 750 détenus. Le médecin chef du service médico-psychologique régional (qui ne peut donner son nom sans accord de sa hiérarchie) tire, lui aussi, la sonnette d’alarme : « Nous, soignants, devons gérer les conséquences de la surpopulation : on voit les gens moins longtemps et moins souvent. On gère les urgences au détriment du travail de fond. Face à une population qui est déjà plus encline à passer à l’acte, le stress de l’enfermement et la suroccupation facilitent les tentatives de suicide. » Aux questions d’Emmanuel Fernandes sur le cas du détenu mort, le médecin oppose le secret médical et l’enquête en cours.

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