• Le performative male ou homme performatif est un nouvel archétype masculin que l’on croise un peu partout depuis quelques mois.
  • Il se dit féministe, déconstruit et assume sa part sensible et vulnérable.
  • En apparence, car il s’agit, en réalité, d’un calcul pour pouvoir séduire les femmes.

Il dit être fan de Simone de Beauvoir. Il se promène avec un livre de Mona Chollet qu’il met bien en évidence, porte des sacs en toile à l’épaule et des écouteurs filaires. Il se dit fan d’astrologie, connaît les subtilités du Balance ascendant Taureau et il adore Dua Lipa. Cet homme se présente à la gent féminine comme étant « déconstruit » et un « allié » des féministes. D’ailleurs, il se dit sensible et ne craint pas de se montrer vulnérable. Sur les réseaux sociaux, on appelle ce nouvel archétype masculin, le « performative male » ou « l’homme performatif ». À l’opposé du macho, et à l’extrême inverse de l’homme toxique (nouvelle fenêtre), cet homme cocherait toutes les cases. En apparence. Pourquoi ? L’homme performatif n’est pas un homme de conviction. Il ne croit pas forcément au discours féministe, mais il l’affiche. Le paraître l’emporte sur l’être, en quelque sorte. « Un homme performatif s’intéresse moins à son identité qu’à la manière dont il organise et projette sa masculinité en public, généralement en ligne. Il est profondément conscient que la virilité est observée, évaluée et consommée, et il la met donc en scène », explique J’Nae Phillips, la créatrice de la newsletter Fashion Tingz à The Guardian. (nouvelle fenêtre) Et ce calcul d’expert n’a qu’une seule intention : séduire les femmes sans vraiment savoir ce dont il parle.

Une forme de masculinisme déguisée

Interrogé par le magazine Le Point, le sociologue et maître de conférences à l’université Sorbonne Paris-Nord, Arthur Vuattoux, explique que le terme « performative male » vise « ces hommes qui défendent des postures progressistes et le féminisme, tout en ayant des pratiques en inadéquation totale avec leurs engagements affichés ». Rien de nouveau sous le soleil, mais il s’agit d’un phénomène plus visible. Sur les réseaux sociaux, on ne compte plus le nombre de posts et de memes affichant et dénonçant ces faux hommes parfaits. Le problème : cette posture est en réalité un leurre et, il peut s’avérer toxique pour l’autre. « Ces hommes sont critiqués pour utiliser un supposé engagement pour séduire dans des cercles féministes, alors qu’ils sont en réalité très différents de ce qu’ils vendent. Ce qui implique une désillusion chez la personne séduite, d’autant plus que ces hommes se revendiquent souvent déconstruits« , explique encore le sociologue. D’autant plus que l’homme performatif « peut interpréter la dureté, la tendresse, la politique, la spiritualité, voire l’incompétence, à condition que cela soit théâtralement encadré« , ajoute la docteure Ashley Morgan, experte en masculinités à l’Université métropolitaine de Cardiff à The Guardian.

Les experts s’accordent par ailleurs à dire que ce nouvel archétype masculin serait en réalité une forme de masculinisme. Plus subtile, plus insidieuse, elle se fait passer pour féminisme en trompant l’autre. Pour l’universitaire, « alors que les rôles de genre traditionnels se dissolvent, les hommes cherchent de nouveaux scénarios à incarner, et la performance offre un moyen de les expérimenter publiquement« .

Sabine BOUCHOUL

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