Un policier a été condamné au civil à Paris à verser 1 000 euros de dommages et intérêts à une femme dont il traitait la plainte pour agression sexuelle et qu’il avait qualifiée de « grosse pute » dans un message vocal laissé par erreur, a appris l’Agence France-Presse (AFP) de source proche du dossier, samedi 8 février.

Selon son arrêt, dévoilé par Mediapart et consulté par l’AFP, la cour d’appel de Paris a condamné au civil, le 30 janvier, ce policier pour « injure non publique à raison du sexe envers la plaignante ». Au pénal, le policier, âgé de 33 ans, avait été relaxé en première instance, en janvier 2024, par le tribunal de police de Paris, qui avait considéré que ces injures ne constituaient pas une « injure non publique en raison du sexe » – une relaxe devenue définitive, car le parquet de Paris n’a pas fait appel. Mais la plaignante a fait appel sur le volet civil pour que la cour reconnaisse une faute du fonctionnaire.

Les faits remontent à 2022 : dans la nuit du 4 au 5 février, une femme de 34 ans avait déposé plainte auprès de policiers du commissariat des 5e et 6e arrondissements de Paris pour « agression sexuelle en état d’ivresse ». Un autre policier de ce commissariat l’avait ensuite appelée et lui avait laissé un message lui demandant de venir compléter sa plainte.

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Croyant avoir raccroché, le policier avait alors dit à une de ses collègues : « Je la rappellerai de toute façon parce que, là, elle doit être en train de cuver. » On l’entendait ensuite lire à haute voix un extrait de la plainte, puis affirmer : « C’est vraiment une pute. (…) Putain, elle refuse la confront’[confrontation] en plus, la pute. Comme par hasard. En fait, c’était juste pour lui casser les couilles, je suis sûr. (…) Putain, grosse pute. »

Suspendu pendant plus de quatre mois

Cette affaire avait suscité de nombreuses critiques sur la prise en charge par les forces de l’ordre des victimes de violences sexuelles.

Gérald Darmanin, alors ministre de l’intérieur, avait dans un premier temps estimé que le policier n’avait « plus sa place » dans la police. « Ce policier a sali non seulement toutes les femmes qui essaient de déposer plainte (…), mais il a sali, il a craché sur l’uniforme de la République de ses 250 000 autres collègues policiers et gendarmes », avait-il estimé, précisant ne pas être « le seul à décider, car il y a des recours juridictionnels ». « J’ai dû supplier le ministre de ne pas me révoquer », avait expliqué le mis en cause au tribunal.

Suspendu pendant plus de quatre mois, le policier a finalement été sanctionné d’une mutation professionnelle, puis en juin 2023 d’une interdiction de contact avec les victimes et les mis en cause pour agression sexuelle.

En première instance comme en appel, il a présenté ses excuses, tout en assurant que son propos ne manifestait que son agacement quant à des irrégularités procédurales.

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Dans son arrêt, la cour a estimé qu’« il n’est pas contestable que le terme “la pute”, répété plusieurs fois, est injurieux et visait, au vu du contexte, [la plaignante], en raison de son sexe. »

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Le Monde avec AFP

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