Des scientifiques du King’s College (Londres) ont découvert qu’un traitement à base d’anticorps monoclonaux pouvait être efficace pour gérer les graves crises d’asthme.
Les résultats de cette étude publiée dans « The Lancet » laissent entrevoir une première percée depuis un demi-siècle dans la prise en charge de cette maladie respiratoire.

Une percée qui pourrait changer la donne. Alors que près de quatre millions de personnes – dont près d’un millier en France – décèdent chaque année d’asthme ou de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), une récente étude soutenue par le laboratoire AstraZeneca pousse à l’optimisme concernant la prise en charge des patients les plus graves. Cette découverte est potentiellement d’autant plus importante que les corticoïdes à usage systémique, devenus la norme pour traiter les crises aigües depuis 60 ans, sont associés à de nombreux effets indésirables. 

Les auteurs du King’s College (Londres) préconisent ainsi, dans un article publié dans les colonnes de la revue spécialisée The Lancet Respiratory Medecine , un nouvel usage du benralizumab, un anticorps monoclonal « qui cible des globules blancs spécifiques, appelés éosinophiles, pour réduire l’inflammation pulmonaire ». Le principe des molécules de ce type est relativement simple : elles se lient aux cellules à l’origine de l’inflammation, en l’occurrence les éosinophiles, et les détruisent. 

Or, s’ils sont déjà administrés pour des traitements de fonds, ces anticorps monoclonaux pourraient également être injectés à plus forte dose lors d’une crise, avec une meilleure efficacité que les traitements classiques. « Le benralizumab est un médicament sûr et efficace, déjà utilisé pour traiter l’asthme sévère. Nous l’avons utilisé d’une manière différente, au moment d’une exacerbation (terme scientifique pour désigner une crise, ndlr), pour montrer qu’il est plus efficace que les comprimés de corticoïdes, qui constituent le seul traitement actuellement disponible », confirme la Dr Mona Bafadhel, l’une des principales autrices, à The Guardian .

Un risque d’échec réduit par quatre

À noter qu’il existe plusieurs types d’asthmes ou de BPCO, différentes parties du système immunitaire réagissant de manière excessive selon les patients. En l’occurrence, on estime que ces globules blancs spécifiques sont impliqués dans environ la moitié des crises d’asthme et dans un tiers des poussées de BPCO. 

Dans le détail, les tests ont été menés sur 158 personnes qui avaient besoin de soins médicaux aux urgences. Les patients ont subi un test sanguin pour déterminer le type de crise et donc ceux qui étaient aptes à suivre le nouveau traitement. « Une dose de 100 mg de benralizumab sous-cutané a réduit par quatre le risque d’échec du traitement à 90 jours et a significativement amélioré les symptômes d’une exacerbation à 28 jours », assurent les scientifiques, qui précisent que l’unique injection « s’est révélée sûre ». Par ailleurs, « près des trois quarts (74 %) des patients (de l’échantillon) ayant reçu le traitement standard ont eu besoin d’un traitement supplémentaire dans les 90 jours, ce qui indique les mauvais résultats que nous obtenons actuellement avec la thérapie actuelle », ajoutent-ils. 

Ces recherches peuvent changer la donne pour les personnes souffrant d’asthme et de BPCO

Dr Mona Bafadhel

En tout état de cause, ces recherches pourraient donc « changer la donne pour les personnes souffrant d’asthme et de BPCO« , affirme la Dr Mona Bafadhel. « Cela va révolutionner la façon dont nous traitons les gens lorsqu’ils sont vraiment malades », martèle-t-elle, auprès de la BBC . Le Dr Sanjay Ramakrishnan, de l’Université d’Oxford, qui a également participé à ces travaux, évoque, lui, des premiers résultats « extrêmement prometteurs ». C’est « une excellente nouvelle« , abonde la Dr Samantha Walker, de l’association caritative Asthma + Lung UK. « Mais il est consternant que ce soit le premier nouveau traitement pour les personnes souffrant d’asthme et de crises de BPCO depuis 50 ans », déplore-t-elle. 

Malgré tous ces signaux positifs, le benralizumab n’est pas prêt pour une utilisation à grande échelle, comme le rappellent la Dr Clarus Leung et le Dr Don D. Sin dans un autre article publié dans The Lancet Respiratory Medecine. D’abord et avant tout, ces résultats doivent être consolidés par un essai clinique de plus grande envergure, qui débutera en 2025. Un examen plus approfondi des effets secondaires potentiels est, par ailleurs, nécessaire. Enfin, il faut une évaluation du rapport coût-efficacité, puisque les anticorps monoclonaux sont particulièrement coûteux. 


Maxence GEVIN

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