Le leader du Parti conservateur, Pierre Poilievre, participe avec son épouse, Anaida, au rodéo 
de Calgary, le 7 juillet 2023.

La « droitosphère » américaine a fait son miel d’une vidéo captée en 2023. A l’occasion d’un point presse tourné dans un verger, on assiste au face-à-face déséquilibré entre le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, droit dans ses bottes et un journaliste qui l’accuse de s’inspirer de Donald Trump. « De quoi parlez-vous ? », le coupe Poilievre tout en continuant nonchalamment à croquer dans une pomme. Déstabilisé, son interlocuteur bafouille. Le député en profite pour resservir son leitmotiv : en revenir à une politique de « bon sens » qui fait défaut au gouvernement actuel.

Sur X, Elon Musk a gratifié la séquence d’un émoji « feu ». La commentatrice pro-Trump américaine Megyn Kelly (ex de NBC et de Fox News) a applaudi sur le même réseau : « Pouvons-nous le faire venir dans notre pays ? » Adoubé, Pierre Poilievre était mis « sur la map » du monde conservateur, comme on dit au Québec.

De Donald Trump, Pierre Poilievre, 45 ans, partage le goût de la formule choc que l’on retient à force d’être rabâchée. Dans sa bouche, l’inflation devient la « justinflation », pour viser nommément le premier ministre canadien, le libéral Justin Trudeau. Devant les caméras comme sur ses tee-shirts de campagne, il affiche son mantra « Axe the tax » (« couper dans les taxes »), bien décidé à passer à la moulinette la taxe carbone, l’impôt sur la pollution instauré par le gouvernement Trudeau.

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A l’instar du milliardaire américain, Pierre Poilievre n’hésite pas à injurier ses adversaires politiques. Jagmeet Singh, le chef du Nouveau Parti démocratique (gauche) ? « Un vendu. » Le premier ministre, Justin Trudeau ? « Un cinglé. » Cette dernière invective a causé son expulsion (provisoire) de la Chambre des communes, le 30 avril. Si le site américain d’informations Vox, de tendance progressiste, a qualifié ce printemps le conservatisme version Poilievre de « trumpisme poli », l’adjectif ne convient pas à tout le monde.

Mêmes recettes que Donald Trump

Dans son bureau de Drummondville, en Centre-du-Québec, Alain Rayes, l’ex-figure du Parti conservateur du Canada, se félicite d’avoir quitté le parti à l’accession de Pierre Poilievre, en septembre 2022, après avoir fait campagne pour son rival, Jean Charest. « Désormais, le parti utilise les mêmes recettes que Donald Trump : la colère, la rage que les gens ont face au système, il la nourrit et utilise des raccourcis intellectuels qui, à mes yeux, n’honorent pas la profession [politique]. Les attaques sur les réseaux sociaux, les demi-vérités… On cherche à tout prix l’extrait de trente secondes qui va devenir viral, pour nourrir la base. »

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