Karim (le prénom a été modifié) a aujourd’hui 18 ans. Il en avait 14 lorsqu’il a accepté, contre quelques billets, de désigner un professeur de son collège, Samuel Paty, à l’homme qui allait l’assassiner. En décembre 2023, il avait été condamné pour ces faits à deux ans de prison, dont six mois ferme aménagés sous bracelet électronique, par le tribunal pour enfants de Paris. Des cinq collégiens qui avaient aidé le terroriste à identifier Samuel Paty à la sortie de son établissement de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), c’est lui qui avait reçu la peine la plus lourde.

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Onze mois après cette condamnation, Karim était de retour devant la justice, lundi 18 novembre, en qualité de témoin cette fois-ci. Le premier procès s’étant tenu à huis clos, c’est la première fois que le public et les journalistes ont l’occasion de l’entendre. Mais il n’a pas grand-chose à dire, Karim. Certes, il reconnaît les faits. Certes, il a des regrets, qu’on devine éternels. Mais quand on en vient aux raisons pour lesquelles il a accepté de « vendre » le professeur à un inconnu qui ne lui voulait manifestement pas du bien, il ne reste que du vide : c’était pour « l’argent ».

A l’invitation du président de la cour d’assises spéciale de Paris, Franck Zientara, le jeune homme, dont la longue chevelure bouclée dégringole sur un sweat-shirt à capuche noir, commence par une déclaration spontanée : « Ben, je regrette, balbutie-t-il, très nerveux. Je ne vais pas vous mentir que j’ai fait une erreur. J’ai plein de regrets et je m’excuse auprès de la famille encore… »

« Je n’ai pas réfléchi… »

Ce vendredi 16 octobre 2020, Karim venait de sortir de classe. Il s’apprêtait à rentrer chez lui quand un « monsieur », comme il l’appelle, l’a interpellé. Le « monsieur » s’appelle Abdoullakh Anzorov, il a 18 ans. « Il m’a proposé de l’argent en échange de montrer le professeur, et moi, j’ai accepté. Je suis allé devant le collège voir des collègues à moi, et ensuite on est allés voir le monsieur, on lui a dit que le professeur était là, et ensuite… [il ferme les yeux] Ensuite, il s’est passé ce drame-là », poursuit-il en contenant son émotion.

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Il s’est en réalité écoulé plus d’une heure entre cette prise de contact et le moment où Samuel Paty a été pointé du doigt par les collégiens à sa sortie de l’établissement. Une heure que Karim a passée en compagnie du djihadiste. « Que vous disait-il ? », s’enquiert le président.

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