Des cadavres à la pelle, des enquêteurs pugnaces, des juges dépassés, du sang, de la chique et des larmes : l’édition française se redécouvre une passion pour les faits divers. Depuis deux ans, titres et collections fleurissent pour satisfaire une tocade qui n’a rien de nouveau. Voilà bien longtemps que les éditeurs, en France, s’échinent à trouver la martingale du true crime, ces enquêtes minutieuses menées sur des affaires criminelles réelles et traitées avec les outils de la narration romanesque. Même André Gide (1869-1951), passionné de faits divers et directeur d’une éphémère collection chez Gallimard, s’y cassa les dents. Sur les dix titres prévus, sa collection « Ne jugez pas » n’en compta que trois, publiés entre 1930 et 1931.

Depuis, les multiples tentatives de donner corps et forme à ce « mauvais genre » ont connu une réussite relative, attachée à un titre davantage qu’à une collection. Albin Michel a publié dans les années 1930 les ouvrages fouillés du magistrat Pierre Bouchardon ; Fleuve noir s’est essayé à l’exercice en 1992-1994 avec sa collection « Crime Story », souvent consacrée à des faits divers à portée historique. D’autres maisons puisent dans les catalogues étrangers le temps d’un « coup », comme les Editions du Rocher, qui publient en 2007 le maître ouvrage Zodiac, de Robert Graysmith, consacré à un tueur en série californien qui sévît en 1968 et 1969. Plus récemment, les Editions Marchialy, qui disposent d’un riche catalogue étranger, ont su donner aussi la parole à des auteurs français (Lieutenant Versiga, de Raphaël Malkin, 2022 ; Les Fantômes du lac, de Manon Gauthier-Faure, 2024), souvent influencés par le style des maîtres, surtout américains – un horizon pratiquement indépassable.

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