L’auteur présumé du meurtre de trois petites filles à la fin de juillet dernier à Southport, dans le nord-ouest de l’Angleterre, lors d’une attaque au couteau qui avait déclenché de violentes émeutes dans le pays, a plaidé coupable, lundi 20 janvier, au premier jour de son procès devant la cour criminelle de Liverpool.
Agé aujourd’hui de 18 ans (17 ans au moment des faits), Axel Rudakubana a reconnu ces meurtres, commis lors d’un cours de danse inspiré de la star de la pop Taylor Swift. Dix autres personnes avaient été blessées, dont huit enfants, dans l’une des pires attaques à l’arme blanche que le pays ait connues depuis des années.
Il a également admis avoir produit un poison extrêmement toxique, de la ricine, et avoir détenu un manuel d’entraînement d’Al-Qaida. La motivation « terroriste » n’a toutefois pas été retenue pour ces meurtres.
Lundi, à son procès, Axel Rudakubana a refusé de se tenir debout devant le tribunal et a répondu « coupable » pour chaque chef d’inculpation. Le fait qu’il plaide coupable écourte la procédure et le juge a annoncé qu’il prononcerait sa condamnation jeudi. En décembre, le suspect avait refusé de parler au tribunal, qui avait alors considéré que ce silence équivalait à un plaidoyer de non-culpabilité et décidé de juger l’affaire lors d’un procès devant initialement durer quatre semaines.
« Une période profondément traumatisante et angoissante »
La ministre de l’intérieur britannique, Yvette Cooper, a annoncé, lundi, l’ouverture d’une enquête publique sur le meurtre de ces trois fillettes. Nous avons « besoin de réponses indépendantes » sur l’action des agences gouvernementales « qui sont entrées en contact avec cet adolescent extrêmement violent », « y compris par le biais d’une enquête publique permettant de découvrir ce qu’il s’est passé, et ce qui doit changer », a-t-elle déclaré, quelques heures après qu’Axel Rudakubana eut plaidé coupable. Elle avait estimé lundi matin que le procès allait être « une période profondément traumatisante et angoissante pour les familles ».
Plus tôt, le premier ministre, Keir Starmer, avait estimé dans une déclaration qu’« il reste de graves interrogations auxquelles il faut répondre sur la manière dont l’Etat a failli à son devoir ultime de protéger ces fillettes. (…) La Grande-Bretagne exige à raison des réponses, et nous ne négligerons aucune piste dans cette quête. »
Dans la foulée de l’attaque, de violentes manifestations anti-immigration avaient eu lieu dans des dizaines de villes en Angleterre et en Irlande du Nord, attisées par des agitateurs d’extrême droite sur fond de rumeurs circulant sur Internet concernant le suspect. Il avait été présenté à tort comme un demandeur d’asile musulman alors qu’il est né au Pays de Galles, dans une famille originaire du Rwanda, et vivait à Banks, une commune près de Southport.
Les violences avaient duré plusieurs jours, durant lesquels des émeutiers s’en étaient pris à des hôtels hébergeant des demandeurs d’asile et à des mosquées, et des affrontements avaient eu lieu avec les forces de l’ordre, mobilisées en masse, ou avec des contre-manifestants.
Le Monde Mémorable
Testez votre culture générale avec la rédaction du « Monde »
Testez votre culture générale avec la rédaction du « Monde »
Découvrir
Le 8 août, des milliers de personnes s’étaient rassemblées à travers le pays pour dire « stop à l’extrême droite », au racisme et à l’islamophobie. Bien qu’Axel Rudakubana soit mineur au moment des faits, la justice a autorisé la révélation de son identité en réponse aux rumeurs circulant à son propos.
Plus de 410 personnes condamnées dans le pays
Le travailliste Keir Starmer, arrivé quelques semaines plus tôt au pouvoir, avait dénoncé des émeutes d’« extrême droite » et promis la plus grande fermeté envers les auteurs de ces violences et ceux qui les avaient attisées en ligne.
A la mi-décembre, plus de 410 personnes avaient été condamnées dans tout le pays en lien avec ces émeutes, dont plus de 360 à de la prison ferme, selon un décompte réalisé par l’agence de presse britannique PA. Deux hommes ont été condamnés à neuf ans de prison, la peine la plus lourde prononcée dans le cadre de la répression de ces violences.
Un organisme chargé de contrôler l’action de la police a estimé que celle-ci avait sous-estimé le climat de violence et le poids de la désinformation qui a culminé avec les émeutes de cet été. L’attaque de Southport a suscité une vague de réactions horrifiées dans le pays.
Le roi Charles III s’était rendu en août sur les lieux pour rencontrer les enfants ayant survécu. Au lendemain de l’attaque, la chanteuse Taylor Swift, alors au milieu de sa tournée planétaire, s’était dite « complètement choquée ». Selon plusieurs médias, la star a rencontré deux des petites filles blessées en marge de ses concerts à Londres en août. Le prince William et son épouse Kate sont aussi allés à Southport en octobre et ont rendu hommage aux équipes de secours.