A la suite des déclarations de François Bayrou sur le non-retour de la retraite à 62 ans, dimanche, la Confédération générale du travail (CGT) a décidé de quitter la table des négociations. Pour Claire Vives, sociologue, ingénieure de recherche au Conservatoire national des arts et métiers, les dés étaient pipés dès le départ.
Trois organisations ont déjà claqué la porte du conclave sur les retraites : Force ouvrière, l’organisation patronale U2P et la CGT. Finalement, était-il une très mauvaise idée ?
Pour répondre, il faut s’interroger sur cet objet « conclave ». Derrière ce terme à connotation religieuse, il s’agit ni plus ni moins que d’une concertation. Ce qui saute alors aux yeux, c’est qu’elle a lieu après une séquence très singulière et mouvementée : un changement majeur pour les retraites a été imposé en 2023 par l’exécutif de manière unilatérale, ce qui a débouché sur une crise sociale et politique de plusieurs mois qui n’est toujours pas refermée.
Cette concertation pouvait-elle permettre d’élaborer une réforme acceptée par les différentes parties (patronale, syndicale, gouvernementale) et, plus largement, par les Françaises et les Français ? En posant la question, on mesure à quel point la tâche est ardue. Et elle l’est d’autant plus que ce qui peut faire l’objet d’une négociation paraît limité. On ne peut pas convoquer les organisations syndicales et patronales du jour au lendemain en leur disant : « Trouvez une solution à la question des retraites », tout en verrouillant les principaux paramètres de la négociation. Depuis des années, l’Etat, au lieu de se poser en garant de bonnes conditions de discussion, déséquilibre constamment le jeu en faveur du patronat.
Dans ce contexte, aucune négociation portant sur des changements substantiels ne peut aboutir pour une raison simple : l’une des parties, le patronat, n’a aucun intérêt à ce qu’un accord soit trouvé. Depuis des années, les intérêts du patronat et du gouvernement sont alignés sur les principaux sujets. La partie salariale ne peut pas obtenir de nouveaux droits par la négociation puisque le patronat n’a aucun intérêt à les accorder. Il n’a jamais la crainte de ce qui sortirait si, en cas d’impasse, l’exécutif reprenait le stylo.
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