Bernard Arnault a subi deux « douches froides » ces derniers temps. La première, en découvrant le projet du gouvernement de François Bayrou d’assujettir les grandes entreprises à une surtaxe d’impôt sur les sociétés dans le budget 2025. « Pour pousser à la délocalisation, c’est idéal », a grincé le PDG de LVMH, le 28 janvier, évoquant une « douche froide » en comparaison des baisses d’impôts massives promises par Donald Trump aux Etats-Unis.

Un second torrent glacé a aussitôt suivi, de réactions outrées, cette fois, sur l’air de la trahison des intérêts nationaux. Le ton est monté si fort – de la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet (« les rats quittent le navire »), au baron de la grande distribution Michel-Edouard Leclerc (« un chantage ») – que le milliardaire s’est senti obligé de réagir. « C’est précisément parce que j’aime la France (…) que j’ai tenu à alerter sur des mesures qui me paraissent en tous points contre-productives », a-t-il affirmé, sur X.

La première fois que Bernard Arnault a fait parler de lui dans Le Monde, en tout cas, c’est à propos d’un monument du patrimoine tricolore : Le Chasseur français, journal aussi célèbre pour ses photos de sangliers que ses petites annonces matrimoniales. Le 31 janvier 1981, une brève signale la cession de ce « mensuel considéré souvent comme le fleuron de Manufrance (650 000 exemplaires en juin 1979) » par son patron de l’époque, un certain Bernard Tapie.

L’acquéreur – la société Férinel, ex-entreprise de travaux publics, désormais spécialisée dans la promotion immobilière – est dirigé par « M. Bernard Arnault, 31 ans, fils du président fondateur ». Un jeune entrepreneur qui s’expatriera sans bruit aux Etats-Unis, quelques mois plus tard, en réaction à l’élection de François Mitterrand et à son programme de nationalisations.

Le luxe, voilà la grande affaire

Bernard Arnault, pourtant, trouve rapidement à s’entendre avec le nouveau pouvoir socialiste. Ce dernier lui accorde, en 1984, la reprise du groupe fondé par Marcel Boussac, le « roi du coton », propriétaire notamment de Christian Dior et du Bon Marché. Un empire placé sous tutelle de l’Etat en raison de graves difficultés financières. Le plan présenté par Bernard Arnault, note le journaliste André Dessot, le 19 décembre 1984, « donne à l’industrie française du textile l’occasion inespérée de trouver un nouveau souffle pour se réorganiser dans les trois directions qui sont les activités de Boussac : l’habillement, le décor et le linge de maison ».

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