• La frontière entre la séduction et la manipulation est très fine.
  • Séduire consiste à susciter l’intérêt ou la sympathie.
  • La manipulation vise à créer un rapport de domination.

« Que vous êtes joli ! Que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage se rapporte à votre plumage, vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois ». C’est en usant de la flatterie que, dans la fable de La Fontaine, le renard parvient à séduire et manipuler le corbeau pour lui chaparder son fromage. Le renard avait compris les ressorts de l’âme humaine qui a besoin de plaire. Dans le cadre d’une rencontre amoureuse ou même dans les liens professionnels, l’être humain a toujours envie de plaire. La séduction n’est pas forcément romantique, c’est plutôt un ensemble de comportements qui vise à susciter de l’intérêt ou de la sympathie. On peut user de différentes techniques : l’humour, l’écoute, la flatterie, la conversation. Mais la ligne entre la séduction et la manipulation est assez fine.

Sur son site Internet, le médecin Franck Senninger, auteur de « La manipulation pour tous », écrit que « la séduction et la manipulation entretiennent une relation ambiguë, oscillant entre le charme légitime et la volonté de contrôle« . Ainsi, séduire consiste à « captiver autrui par le charisme, la manipulation s’inscrit dans une stratégie où l’autre devient un moyen et non une fin en soi« .

L’intention : le détail qui change tout

La manipulation peut également servir d’outil pervers pour séduire, notamment dans le cas du love-bombing. Afin d’attirer l’autre dans ses filets, le manipulateur va couvrir sa proie d’amour, de mots tendres, de cadeaux et autres promesses. Faire la différence entre séduction et manipulation n’est pas chose aisée. Pour la psychanalyste Anne-Marie Benoit, interrogée par Psychologies Magazine, il est important d’écouter notre corps et les signaux qu’il envoie. « Nous sommes tout à fait capables de faire la différence entre un trouble ‘exquis’ ou qui est le fruit de notre timidité par exemple, et un trouble de défense« . Elle précise, par ailleurs, que « la séduction sincère laisse le consentement libre. C’est un jeu qui se joue à deux, à égalité. C’est une relation qui se tisse à un rythme singulier qui ne doit pas obéir à un cadre préétabli« . Dans le cadre de la manipulation, il s’agit de détourner la perception de l’autre (de manière consciente ou non), dans le but d’obtenir quelque chose : l’admiration, le pouvoir ou la soumission.

« La manipulation est une forme perverse de la séduction : elle s’appuie sur les mêmes leviers (le charisme, la rhétorique, l’émotion), mais dans un but utilitaire« , souligne le docteur Franck Senninger. Ainsi, si les compliments font plaisir, la flatterie est excessive et caricaturale, outil idéal pour manipuler. Si, dans le cadre d’un rapport de séduction, les cadeaux et les invitations sincères n’appellent pas à un retour, ils sont désintéressés. En revanche, lorsqu’ils sont utilisés pour recevoir quelque chose en contrepartie, il s’agit, là aussi, de la manipulation. L’autre adore tout ce que vous faites ? Il trouve des points communs absolument partout ? Cela peut ressembler à une stratégie pour forcer le lien et l’attachement, preuve que le dosage et l’intention peuvent tout changer. Pour Franck Senninger, « séduction et manipulation ne sont pas toujours opposées ; elles s’entrelacent subtilement. Là où la première peut être un jeu esthétique et relationnel, la seconde vise la domination et la dépossession de l’autre ».

Sabine BOUCHOUL pour TF1 INFO

Partager
Exit mobile version