Ville et transports sont en équilibre permanent. A la ville pédestre ont succédé la ville des transports publics puis la ville automobile. Jusqu’au milieu du XIXᵉ siècle, les villes étaient à l’échelle du piéton, mêlant de hautes densités de population et une mixité de fonctions urbaines. Puis des faubourgs se sont développés le long des lignes de tramway, et les bourgs ont grossi autour des gares périurbaines. Enfin, l’essor de l’automobile a généré un étalement urbain et une spécialisation fonctionnelle marqués : un centre historique voué au tourisme et aux achats plaisir, des lotissements de maisons individuelles, des zones d’activités et des centres commerciaux à la périphérie. La grande ville n’a plus de frontières précises et cette fonctionnalisation de l’espace a renforcé en retour un usage prédominant de l’automobile.

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Dans les années de l’après-guerre, la voiture a d’abord conquis les centres-villes, où les autorités comme la grande majorité de la population étaient persuadées qu’il fallait donner toute sa place à ce symbole de modernité et de liberté de déplacement. Tous les espaces publics sont devenus progressivement des aires de stationnement : les places, les terre-pleins, les trottoirs, le moindre terrain vague. Les modes motorisés ont commencé à enfumer les rues, à assourdir les passants, à bousculer les cyclistes alors encore nombreux, à écraser les enfants qui jouaient traditionnellement dans la rue. La prise de conscience de ces nuisances et de leur mélange nocif a amené les populations à réclamer des centres-villes et des quartiers apaisés, en exigeant une réduction du trafic, des contournements routiers, des vitesses réduites et la piétonnisation de certaines rues.

Aujourd’hui, suivant en cela les villes de pays plus densément peuplés, comme les Pays-Bas ou l’Allemagne, toutes les grandes agglomérations françaises ont désormais apaisé leur centre. Depuis lors, cette modération de la circulation progresse en proche banlieue et même dans la grande périphérie, où les familles réclament des trottoirs libérés du stationnement illicite pour ne plus devoir toujours accompagner leurs enfants à l’école ou à leurs activités. Les villes moyennes s’y mettent également, suivies déjà par certaines petites villes.

Le piéton au sommet de la hiérarchie

Il reste une question-clé : si la priorité donnée à l’automobile pendant des décennies n’est plus, à qui faut-il désormais l’accorder ? Le débat est loin d’être tranché et demeure en France largement souterrain. Certains considèrent que les transports publics doivent constituer l’ossature de la mobilité future en les rendant même gratuits. D’autres croient voir dans le vélo urbain la solution la plus souple et la plus économique. D’autres enfin estiment que le piéton devrait être au sommet de la hiérarchie des modes de déplacement, parce qu’il est sans conteste, parmi tous les modes, le plus inclusif, le plus démocratique, le moins nuisible et le meilleur pour la santé. C’est à cette dernière conclusion que se sont ralliées les trois régions belges en adoptant tour à tour le « principe STOP », un acronyme qui signifie « piéton, vélo, transport public et voiture » en néerlandais.

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