Peut-on croire encore au progrès social ? C’est la question qu’on peut se poser en voyant comment, en quinze ans, on est passé de l’Indignez-vous !, de Stéphane Hessel (1917-2013), au Bloquons tout le 10 septembre. Quand, en octobre 2010, l’ancien résistant publie Indignez-vous ! (nouvelle édition : Rue de l’Echiquier, 64 pages, 4,90 euros), sa colère joyeuse rentre en résonance avec ce que pensent des millions d’entre nous sur la nécessité de réguler la finance et de lutter contre les inégalités. Quinze ans plus tard, ces questions restent cruellement d’actualité et l’appel Bloquons tout peut sembler plus désespéré que celui du diplomate et défenseur infatigable des droits humains. A quoi sert de bloquer tout dans un pays déjà à l’arrêt ? Face à la gravité des crises dans lesquelles s’enfonce notre pays, exprimer une colère contre la classe politique de façon non violente est nécessaire, mais ce n’est qu’une étape. Comment remettre notre pays en mouvement ? Comment lutter contre le découragement ?

Aux yeux de Stéphane Hessel, c’était une question-clé. Alité, peu de temps avant qu’il ne nous quitte [le 27 février 2013], Stéphane insistait : « Beaucoup veulent baisser les bras, mais il faut leur rappeler que nous avons déjà connu des périodes sinistres et nous en sommes sortis. Les horreurs de la guerre, l’apartheid, le mur de Berlin… » Quand le découragement me guette, je repense à cette discussion.

Je pense aussi à ces moments où, le politique étant bloqué, des citoyens se sont donné les moyens de reprendre la main. Le 19 juin 1872, alors que l’Assemblée nationale est paralysée, une carriole lourdement chargée de pétitions venues de toute la France (plus de 1 200 000 signatures !) parvient à la Chambre alors installée à Versailles. Elles demandent l’école gratuite et obligatoire. Vous pensiez que Jules Ferry était à l’origine des grandes lois sur l’éducation ? Non : c’est le peuple.

Donner la voix au peuple

En 1936, c’est encore le peuple qui prend la main. Léon Blum est hostile à l’idée de congés payés qu’il pense dangereuse pour notre économie. Mais le peuple les exige avec force et, aujourd’hui, nous sommes des millions à en profiter.

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