Le tribunal correctionnel de Paris a condamné lundi Marine Le Pen à une peine d’inéligibilité de cinq ans avec exécution immédiate.
La cheffe du RN a également été condamnée à une peine d’emprisonnement de quatre ans dont deux fermes, aménagés sous bracelet électronique.
Depuis, la présidente de la 11e chambre et les deux procureurs, font l’objet de menaces.
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Procès du RN : Marine Le Pen et le parti condamnés
Après une décision contestée, des réactions extrêmes ne se sont pas fait attendre. Dès lundi 13h15, juste après que le tribunal correctionnel de Paris a rendu son jugement concernant Marine Le Pen pour détournement de fonds publics, un flot de menaces a été déversé sur les réseaux sociaux à l’encontre de la présidente de la 11e chambre et des deux procureurs.
Condamnée à une peine d’inéligibilité de cinq ans avec exécution immédiate et à une peine d’emprisonnement de quatre ans dont deux fermes, aménagés sous bracelet électronique, la présidente du Rassemblement national ne pourra donc pas se présenter à la présidentielle de 2027 sauf si son procès en appel et son jugement interviennent avant les élections…
Des « vermines » qui devront « rendre des comptes »
En guise de vengeance, les noms des magistrats ont été jetés en pâture sur les réseaux sociaux. Des photos de la présidente de la 11e chambre ont été volées sur des sites puis diffusées en masse avec des insultes, sobriquets, et menaces à la clé. Même une partie de son adresse a été diffusée. « Il faut juger la juge », « la juge rouge du syndicat de la magistrature », « Voilà, c’est elle, cette juge gauchiste (…) qui prive indirectement les Français de leur droit de vote », « J’ai son adresse si vous voulez lui rendre une petite visite », peut-on lire notamment sur le réseau social X.
Les trois magistrats sont désignés notamment, sur X, comme « les trois vermines qui ont décidé de 2027 » à la place des citoyens, ou « les trois juges qui ont assassiné Marine Le Pen ». « Les procureurs et la présidente devront rendre des comptes ni oubli ni pardon », demande un autre sur le même réseau social.
Les autorités volent au secours des magistrats
Immédiatement, les autorités ont dénoncé ces propos. « Les menaces proférées contre les magistrats du Tribunal judiciaire de Paris sont inacceptables dans une démocratie et préoccupantes pour l’indépendance de l’autorité judiciaire », a écrit lundi soir le ministre de la Justice Gérald Darmanin sur X.
Le Conseil supérieur de la magistrature a lui exprimé « son inquiétude face aux réactions virulentes suscitées par la décision rendue, réactions de nature à remettre en cause gravement l’indépendance de l’autorité judiciaire, fondement de l’État de droit, dont le Conseil supérieur de la magistrature est le garant constitutionnel ». Il a rappelé que« les menaces visant personnellement les magistrats en charge du dossier, tout comme les prises de parole de responsables politiques sur le bien-fondé des poursuites ou de la condamnation, en particulier au cours du délibéré, ne peuvent être acceptées dans une société démocratique ».
Le premier président de la cour d’appel de Paris Jacques Boulard a, lui aussi, dénoncé dans un communiqué ces « menaces »
Exprimant « sa vive préoccupation », il a déploré que la décision rendue par le tribunal de Paris suscite, « en particulier sur les réseaux sociaux, des attaques personnelles à l’encontre des trois magistrats composant la collégialité ». « Dans un État de droit démocratique, la critique d’une décision de justice ne peut en aucun cas s’exprimer par des menaces formulées à l’égard des magistrats », a-t-il insisté.
« Ces offensives contre les magistrat-es et les tentatives de discrédit de l’institution judiciaire sous l’accusation de ‘justice politisée’ sont intolérables dans un État de droit' » a écrit de son côté le Syndicat de la magistrature dans un communiqué.
« Décisions de justice soutenues » et « magistrats protégés »
Que dit la principale intéressée de toute cela? Invitée au 20H de TF1 quelques heures après l’énoncé du jugement Marine Le Pen avait fustigé lundi une « décision politique » et un « jour funeste pour notre démocratie ». Devant les députés RN rassemblés ce mardi matin pour une réunion de groupe à l’Assemblée nationale, la présidente du parti a toutefois estimé qu’il était « scandaleux que les magistrats fassent l’objet de menaces » avant d’ajouter « Mais c’est hélas devenu d’une grande banalité ».
François Bayrou qui s’était, selon son entourage, dit « troublé » après le jugement de Marine Le Pen, a affirmé mardi à l’Assemblée qu’il n’y avait « pas de possibilité, a fortiori pour un responsable gouvernemental, de critiquer une décision de justice », et que « même nous n’en avons pas le droit ».
Le Premier ministre a aussi apporté un « soutien (…) inconditionnel, non mesuré » et « puissant » aux magistrats ayant rendu cette décision, considérant « très important que l’ensemble de la représentation nationale formule ce soutien ».
Rondes et patrouilles
Reste que, suite à ces menaces aux magistrats, des mesures ont été rapidement prises. Ainsi, depuis lundi, des rondes et patrouilles de police sont effectuées aux abords du domicile de la présidente.
Une enquête devrait être ouverte incessamment sous peu par le parquet de Paris suite à ces menaces. Et ce ne sera pas la première.
Fin janvier 2025, une enquête avait été ouverte suite à des menaces de mort postées sur le site d’extrême droite Riposte laïque visant les trois magistrats du procès contre le RN pour détournement de fonds européens.