Valeurs contre valeurs. Mots contre mots. France contre France. Les communes sont voisines, les votes sont aux antipodes, comme un concentré du choc électoral et politique en cours depuis la dissolution du 9 juin. Dans la 9e circonscription du Val-d’Oise, Gonesse et Roissy-en-France partagent un même territoire, à la lisière des espaces ruraux de l’Ile-de-France, mais racontent deux histoires, deux sociétés, deux visions.

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La première, en zone urbaine, très populaire, a mis en tête le député La France insoumise (LFI) sortant avec quasiment 50 % des voix lors du premier tour des élections législatives anticipées, dimanche 30 juin. La seconde, rurale, touristique, portée par l’activité de l’aéroport international, a placé la candidate soutenue par le Rassemblement national (RN) largement en tête, avec plus de 43 % des suffrages.

Un scénario qui se retrouve à l’échelle de la circonscription, avec des villes populaires (Goussainville, Louvres) à gauche, qui s’opposent à des communes rurales largement favorables à l’extrême droite. Le second tour s’annonce serré, dimanche 7 juillet, avec le député sortant Arnaud Le Gall (LFI, 36,5 %) face à Agnès Marion (RN, ex-Reconquête !, 32,7 %) et des électeurs Les Républicains (LR) et de la coalition présidentielle Ensemble en situation d’arbitrage.

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« Je ne les supporte pas »

Les électeurs du RN de Roissy-en-France n’ont plus de tabou à parler d’immigration et de leur rejet, abyssal, viscéral, des quartiers sensibles, de ces banlieues bien plus éloignées, dans leur représentation du monde, que les destinations vers où décollent les avions de Roissy. Leurs mots sont brutaux et expriment bien plus qu’un choix électoral, une impossibilité à leurs yeux de vivre ensemble.

Liliane Littière, par exemple, 66 ans, volubile vendeuse à la retraite, habitante de Roissy depuis quarante ans, a glissé un bulletin RN et l’accompagne, à la sortie du bureau de vote, de ses certitudes. « Je ne reconnais plus la France », dit-elle. « Le Front populaire fera venir encore plus d’immigrés », ajoute-t-elle. Et cette précision qui montre que le rejet se joue aussi dans la rue, chez elle : « J’ai trois voisins qui sont partis, remplacés par trois couples musulmans. »

Maria Teresa, 76 ans, ne veut pas que son nom de famille soit publié. Ce qui se joue pour elle est existentiel. « Même à quatre pattes, je serais venue pour voter RN. » Son père, maçon, sa mère, au foyer, étaient arrivés d’Italie dans les années 1950. « Vous devez être respectueux, ils nous disaient ! » Ses mots deviennent même vulgaires lorsque la colère l’emporte.

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