Une chasse à l’œuf tacheté à hauteur d’enfants dans « Riddle of Fire », de Weston Razooli.

L’AVIS DU « MONDE » – POURQUOI PAS

Présentés au Festival de Cannes, en mai 2023, à la Quinzaine des cinéastes, The Sweet East, de Sean Price Williams, et Riddle of Fire, de Weston Razooli, venaient nous annoncer la vitalité retrouvée du cinéma indépendant américain. Sans se concerter, les deux films se frottent à la magie du conte. Alice au pays des merveilles pour le premier, tandis que Riddle of Fire tente l’aventure enfantine qui aurait rencontré les codes du jeu d’heroic fantasy : trois gamins, ivres de leur temps libre, s’organisent pour subtiliser une console de jeux stockée dans un entrepôt.

Mais la télévision familiale est verrouillée par un mot de passe que la mère, convalescente, refuse de divulguer. A moins qu’on ne lui rapporte la tarte aux myrtilles dont elle raffole. Mais ce jour-là la pâtissière n’est pas là. Il faudra donc la confectionner soi-même : le trio part en quête d’un œuf tacheté, ingrédient indispensable à ladite tarte.

Riddle of Fire est entièrement construit autour de cette chasse à l’œuf qui mènera les trois gosses dans une suite de hasards et de rencontres improbables notamment avec une bande de néo-hippies (finalement plus hipsters qu’autre chose) qui se trouve en possession du précieux ingrédient.

Un univers vidéoludique

Dans sa mise en place, le film offre le doux vertige d’une fiction buissonnière qui s’invente sous nos yeux, ruminant les références sans d’abord s’y réduire : on pense à Quentin Tarantino ; à Stand by Me (1986), de Rob Reiner ; aux Goonies (1985), de Richard Donner ; à La Nuit du chasseur (1955), de Charles Laughton ; et à tout un univers vidéoludique que le film a la bonne idée d’utiliser comme référent esthétique mais qui finit de réduire la narration à une pure surface sans profondeur ni terreur d’enfant.

Tenue jusqu’au bout, la quête de l’œuf s’avère un enjeu trop limité pour tenir sur la longueur, transformant bientôt le film en programme balisé : la licence poétique tourne à vide, les jeunes acteurs semblent jouir d’une liberté sous contrainte.

Sous les herbes folles scénaristiques, Riddle of Fire laisse finalement apparaître un joli objet indie un peu trop inoffensif, écartelé entre deux intentions contradictoires : laisser les clés du film aux gosses tout en surjouant, dans leur dos, le geste d’auteur insolite.

Film américain de Weston Razooli. Avec Lio Tipton, Charles Halford, Weston Razooli (1 h 54).

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