Les communiqués des institutions transatlantiques sont pleins de promesses : baisse de droits de douane sur certains produits, ouvertures de marchés et projets d’investissements considérables. Pour autant, ces annonces ne sont pas suivies d’effets dans les textes officiels. Aucun accord signé, aucun vote, aucune notification à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Les responsables affirment qu’un document sera établi rapidement, qu’il viendra « en temps voulu », mais cette promesse reste théorique et aucune information à ce sujet n’a été rendue publique. Ce n’est pas un point de détail : cela traduit au contraire un tournant profond. Avant, les accords passaient par des négociations, des textes clairs, un cadre institutionnel, des votes. Désormais, une simple déclaration suffit pour que l’on parle d’accord.

Des deux côtés de l’Atlantique, cette situation arrange les instances décisionnaires. Aux Etats-Unis, le Congrès n’a plus de mandat pour approuver un traité de ce type et l’administration agit seule, par le biais des instruments internes. Dans l’Union européenne, un accord formel impliquerait le Conseil, le Parlement, parfois les Etats membres. Trop long, trop risqué. Les deux blocs préfèrent donc l’annonce à la procédure, évitent les sujets clivants, comme l’agriculture, les normes ou le climat, et se contentent de mesures sectorielles sur lesquelles il est facile de revenir. L’heure est à l’immédiateté plutôt qu’aux engagements politiques de long terme.

Nous n’assistons pas seulement à un changement de forme : le centre de décision s’est déplacé. Les parlements sont contournés, les dirigeants publient des listes de produits, ajustent des tarifs et promettent des résultats, sans que rien ne verrouille ces engagements. Y déroger n’a aucun coût politique, et les entreprises voient les droits baisser tout en sachant que tout peut s’arrêter. Dès lors, comment planifier des investissements à long terme ?

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Ces mesures, bien qu’elles ne soient pas juridiquement contraignantes, ont des conséquences claires : l’instabilité pour les acteurs économiques d’une part, et l’importance accrue des détails techniques d’autre part. L’absence de traité confère une importance inédite aux procédures de conformité et un pouvoir considérable à celui qui les contrôle. Enfin, ces mesures, en traduisant une préférence bilatérale, ont un effet sur les pays tiers, qui se trouvent renvoyés aux marges des flux commerciaux et n’ont aucun moyen d’en sortir.

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