La porte ne ferme pas, la pluie dégouline du plafond, un brasero sert de chauffage et l’eau, qu’elle est allée chercher au café à côté, gèle dans un verre… Ceux qui ont connu Claire Tabouret au début des années 2010 racontent un atelier glacial, à Pantin, en banlieue parisienne. Là, au milieu des immenses toiles de visages intranquilles, la jeune femme à la voix calme, au coup de pinceau décidé, expliquait, face au canapé défoncé où le visiteur avait pris place, la nécessité qu’elle avait – et lui aussi – d’être là.
Laurent Dumas fut l’un de ces collectionneurs de la première heure à fréquenter le canapé : « Tout ça racontait à quel point elle était investie, habitée par son travail », témoigne, encore sous le charme, le président du groupe immobilier Emerige, qui prépare sur l’île Seguin, à Boulogne-Billancourt, un grand pôle culturel comprenant un centre d’art contemporain. « La première chose qu’elle faisait le matin, avant de se lancer dans ces grands formats, c’était un autoportrait. J’y voyais une forme d’introspection, manière de marquer la trace de ses journées. »
A l’époque dont nous parlons, Claire Tabouret n’a pas 30 ans. Un peu plus d’une décennie plus tard, c’est ce mezzo voce, cette façon éthérée de dire sa place sans la revendiquer, d’affirmer sans clamer, de peindre sans asséner, que le jury rassemblé autour de Bernard Blistène, l’ancien patron du Centre Pompidou, a choisi pour imaginer les six vitraux contemporains prévus dans les chapelles du bas-côté sud de la nef de Notre-Dame de Paris. Sacré honneur que de s’inscrire ainsi dans une histoire millénaire. Et sacrée responsabilité que de porter ce projet de 4 millions d’euros voulu par l’Etat et le clergé, mais que les cris outrés des défenseurs du patrimoine, dénonçant comme un blasphème le fait de remplacer les verrières aux formes géométriques installées au XIXᵉ siècle par Viollet-le-Duc, ont transformé en pataquès politico-médiatique.
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