Dans son discours de politique générale mardi, Michel Barnier a dit vouloir poursuivre le développement des énergies renouvelables, avec un clair bémol sur l’éolien.
Deuxième source de production d’électricité en France en 2023, elles sont pourtant présentées comme une condition de la sortie de la dépendance aux énergies fossiles.
France renouvelables, qui représente le secteur des énergies renouvelables électriques, propose trois axes pour accélérer, dont un tarif de l’électricité moins cher quand la production « verte » est élevée.

Parmi les secteurs qui attendaient avec une certaine impatience le discours de politique générale de Michel Barnier mardi, se trouvait toute la filière de l’énergie, qui attend depuis des semaines d’être fixée sur les grandes orientations de la France en la matière. La dissolution a en effet interrompu les travaux en cours et la publication de la Stratégie nationale bas-carbone et de la programmation pluriannuelle de l’énergie, deux documents clés qui fixent la trajectoire du pays pour réduire sa dépendance aux énergies fossiles et atteindre ses objectifs climatiques.

 

Face à l’hémicycle, Michel Barnier a assuré que « les travaux de planification » dans le domaine de l’énergie et du climat allaient « reprendre immédiatement ». Évoquant la « dette écologique » du pays, le Premier ministre a surtout prôné le développement du nucléaire, mais aussi évoqué la poursuite « du développement des énergies renouvelables ». Avec un net bémol pour les éoliennes. Fidèle à ses positions prises par le passé , il a ainsi dit vouloir « mesurer mieux tous leurs impacts » et a semblé plus intéressé par le développement de la chaleur renouvelable pour décarboner la production d’électricité.

Les énergies fossiles représentent 60% de la consommation d’énergie en France

Une stratégie que craignaient les acteurs de la filière des énergies renouvelables électriques (éolien en mer, sur terre et photovoltaïque) avant même le discours de Michel Barnier. « S’intéresser seulement à la chaleur renouvelable, c’est faire un tiers du job », a ainsi déclaré le délégué général de France renouvelables, Michel Gioria, à l’occasion d’une présentation mardi matin des chiffres annuels de l’Observatoire du système électrique. « L’électrification des usages représente, elle, deux tiers du travail pour sortir des énergies fossiles. »

Car si les énergies renouvelables ont représenté la deuxième source de production d’électricité (après le nucléaire et pour la première fois devant l’hydraulique), les énergies fossiles représentent encore plus de 60% de la consommation d’énergie en France.

Un super tarif heures creuses

Pour sortir de cette dépendance, France renouvelables, qui représente les acteurs de la filière des énergies renouvelables électriques, défend au contraire une accélération : multiplier par cinq la puissance photovoltaïque du pays d’ici à 2035, multiplier par deux celle de l’éolien terrestre et par 12 l’éolien en mer. Comment ? En faisant davantage correspondre production et consommation, par exemple.

 

France renouvelables propose ainsi la création d’une sorte de « super tarif heures creuses ». « Il s’agit d’instaurer un tarif spécifique quand les énergies renouvelables produisent le plus, vers la fin de l’hiver et le début du printemps », explique le directeur stratégique Mattias Vandenbulcke. « En réorientant la consommation à des moments précis, cela permet de rééquilibrer le système et de faire baisser la facture des Français. »

 

Il s’agit de redonner de l’attractivité à l’électricité

Mattias Vandenbulcke, directeur stratégique de France renouvelables

Cette tarification horaire et saisonnière permettrait de proposer le premier kilowattheure gratuit pour chaque consommateur en redistribuant à bas prix l’électricité produite lors des pics de production solaire et éolien. Un système qui, selon France renouvelables, résoudrait plusieurs problèmes : réduire la consommation d’électricité d’origine fossile (et donc la dépendance de la France aux importations), atteindre les objectifs climatiques de la France, préserver le porte-monnaie des consommateurs et la compétitivité des entreprises, atténuer l’émergence de prix négatifs (quand la production d’électricité d’origine renouvelable est forte et la demande est faible).

 

« Il s’agit de redonner de l’attractivité à l’électricité », poursuit Mattias Vandenbulcke. Car avec la crise énergétique et la hausse des prix de l’énergie, la consommation électrique des Français a diminué (-15%), avec une forme de sobriété subie. À côté des politiques nécessaires de sobriété et d’efficacité énergétique, France renouvelables défend donc une électrification des usages qui permet de réduire la dépendance aux fossiles.

Le deuxième pilier proposé par l’organisme est l’adoption d’un « Plan France Stockage » : il s’agit, en somme, de dessiner la carte du stockage de l’électricité en France (où et quels volumes), en développant le système de batteries, essentiellement, et en permettant de mieux gérer les pics de production. Selon l’organisme, ce plan doit permettre d’installer 6 GW de capacités de stockage d’ici à 2030. 

Enfin, France renouvelables appelle à un « Electrification Act » : une grande loi planifiant la trajectoire énergétique de la France. Sur ce sujet, l’absence de planification ou les retards pris dans les différents plans sont autant de mauvais signaux pour l’industrie. Ainsi, les usines françaises produisant du matériel pour les parcs éoliens en mer vont souffrir, entre 2026 et 2029, d’un trou de commandes faute d’appels d’offres insuffisants entre 2017 et 2021. 

Le gouvernement doit publier dans les semaines qui viennent la carte de France des zones favorables au déploiement de l’éolien en mer sur toutes les façades maritimes du pays.


Marianne ENAULT

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