Les dépouilles se succèdent, portées à bout de bras par des hommes qui rejoignent le cimetière d’un pas rapide, traversant la rue principale devenue une large allée de boue après le passage des bulldozers israéliens, à l’entrée du camp de réfugiés de Nour Shams, dans le nord de la Cisjordanie. Les corps des combattants ont été recouverts des drapeaux du Hamas ou du Jihad islamique ; leur passage est salué par des salves de tirs d’hommes aux visages masqués. A côté du cortège funéraire, des équipes de la sécurité civile palestinienne s’affairent à effacer les stigmates du raid israélien, en raccordant ici des câbles électriques, là des canalisations.

Jeudi 18 avril, l’armée israélienne a coupé l’eau, l’électricité et envahi, en fin de journée, les étroites allées de Nour Shams, à la lisière de la ville de Tulkarem. Le raid a duré plus de cinquante heures ; bulldozers et forces spéciales se sont retirés samedi soir.

Selon le Croissant-Rouge palestinien, quatorze personnes ont été tuées dont deux adolescents – l’un d’eux, en réalité, a été visé par un tir dans un autre camp de Tulkarem. Parmi elles, dix étaient des combattants. L’armée israélienne dit les avoir tués « en combat rapproché, [avoir] appréhendé quinze suspects recherchés, avoir saisi de nombreuses armes et détruit des dizaines d’engins explosifs ». Neuf soldats et un agent de la police des frontières ont été blessés. Selon les habitants, deux autres Palestiniens sont morts pendant le raid, dont un homme qui a succombé à une crise cardiaque.

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Dimanche, les visages étaient fermés, encore sous le choc. Les soldats israéliens font des incursions brutales régulièrement, mais ce raid était le plus violent qu’ait connu le camp depuis 2002 selon l’agence de presse palestinienne WAFA. « Pourquoi sommes-nous les seuls, dans les camps, à résister ? », interpelle avec colère un jeune homme. Les lieux de vie ont été ravagés : échoppes, restaurants saccagés, le club du camp et le centre pour handicapés rasés.

« Deux jours et deux nuits d’horreur »

Dans une venelle un peu plus loin, une flaque de sang n’a pas été nettoyée. Plusieurs corps ont été ramassés ici, des combattants tués dans la maison voisine, où ils s’étaient retranchés en l’absence des propriétaires. Murs et plafond sont criblés d’impacts de balles. Dans la chambre où les Palestiniens armés ont été tués, au-dessus de la porte, un soldat a dessiné une étoile de David à côté d’une date : « 7.10 », le 7 octobre 2023, jour de l’attaque du Hamas en Israël. Le mot neqamah, vengeance en hébreu, a également été tracé au marqueur sur l’une des armoires.

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