En commission, les députés continuent de réécrire le budget de la Sécurité sociale

Détricotage des hausses de cotisations des entreprises, taxes sur les grandes fortunes, les superprofits, le sucre ajouté ou l’alcool : les députés ont continué de réécrire largement, mercredi en commission, le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2025.

A l’unanimité, les membres de la commission des affaires sociales ont commencé par supprimer, dans l’après-midi, une mesure visant à appliquer aux apprentis deux contributions sociales (CSG et CRDS) pour un gain estimé de 360 millions d’euros. Ils ont ensuite voté le maintien d’une exonération pour les start-ups (« jeunes entreprises innovantes »), que l’exécutif entendait supprimer. Idem pour une autre niche au profit des armateurs maritimes.

La facture s’allonge donc, après le rejet pur et simple mardi soir d’un article clé du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), censé refondre les allègements de cotisations patronales, et dégager au passage quatre à cinq milliards d’euros.

Il s’agit d’un désaveu d’autant plus grand pour le gouvernement que ses soutiens de droite et macronistes en sont à l’origine, avec l’appui du Rassemblement national. Le rapporteur général Yannick Neuder (LR) a toutefois indiqué avoir « eu des contacts » avec le gouvernement, en vue d’une « réécriture » de l’article contesté.

La gauche a ensuite engrangé des points dans la soirée, faisant adopter divers amendements susceptibles d’apporter plusieurs milliards de nouvelles recettes à la Sécu, dans l’objectif de limiter les économies drastiques prévues par le gouvernement, et de pouvoir envisager l’abrogation de la réforme des retraites.

Sous les applaudissements, elle a ainsi fait adopter « une contribution de solidarité sur la fortune des milliardaires français », au taux fixé à 2 %. Selon l’ONG Oxfam, avec une telle taxe, « on récupère douze milliards d’euros » pour le système de retraites, a lancé la socialiste Océane Godard.

La commission a aussi validé la création d’une taxe sur les « superprofits » (bénéfices importants) des entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 750 000 euros, d’une taxe sur les dividendes, et le réhaussement de la taxation des « retraites chapeau » (financées par les entreprises) très élevées.

Echaudés par la cession par Sanofi, à un fonds américain, de sa filiale de médicaments sans ordonnance qui commercialise le Doliprane, les députés ont validé un amendement de Yannick Neuder, visant à renforcer les pouvoirs de l’Etat en matière de souveraineté sanitaire.

Le texte prévoit de soumettre systématiquement ce type de transfert à une « autorisation préalable » du ministère de l’économie, conformément à une procédure prévue par le code monétaire et financier. Sans quoi l’entreprise serait redevable d’une lourde contribution.

Pour mieux « prévenir » les maladies chroniques et les addictions, la commission a validé plusieurs taxes nouvelles, notamment sur les bières aromatisées et sucrées, les bières à « fort degré alcoolique », une extension à tous les alcools de la « cotisation sécurité sociale », ou encore une taxe liée à la teneur en sucre des produits alimentaires transformés. Ils ont décidé de rendre obligatoire la mention du « nutriscore » sur les supports publicitaires pour des denrées alimentaires.

« Les industriels planquent du sucre » partout et cette taxe les poussera « à modifier leurs recettes », a défendu l’écologiste Sébastien Peytavie, le socialiste Jérôme Guedj appelant à « prendre à bras le corps la dépendance organisée au sucre », un « scandale » sanitaire.

Après de vifs débats, les députés ont toutefois rejeté un amendement qui réhaussait les taxes sur le tabac, pour aller vers un paquet de cigarettes à 16 euros en 2027 ; certains comme Thomas Ménagé (RN) ou Thibault Bazin (LR) pointant le risque de report vers les produits de contrebande.

Les esprits se sont échauffés autour de l’idée – finalement rejetée – d’indexer sur l’inflation la taxation sur l’alcool, aujourd’hui plafonnée. La gauche a défendu une mesure de « santé publique » contre un « produit dangereux », lorsque d’autres élus comme Nicolas Turquois (MoDem) ont refusé d’aggraver les difficultés des viticulteurs, éprouvés par une « année climatique catastrophique ».

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