Remy Madinier est chercheur au Centre national de la recherche scientifique et à l’Institut d’Asie orientale de l’Ecole normale supérieure de Lyon. Spécialiste de l’Indonésie, il revient sur la mobilisation exceptionnelle qui a embrasé le pays fin août, durement réprimée, faisant au moins dix morts et 20 disparus. Derrière l’augmentation des indemnités que s’étaient octroyées les parlementaires, le mouvement est le symptôme du mécontentement profond de la population de ce pays de 284 millions d’habitants, face au népotisme et à la corruption des élites politiques et économiques qui dirigent le pays.
Où en est la mobilisation ?
Elle est retombée depuis une quinzaine de jours, conséquence d’un déploiement massif des forces de l’ordre, armée comprise, de la fermeture des écoles et de plusieurs milliers d’arrestations. La crainte d’une instauration de la loi martiale, la fuite d’un document de l’armée appelant des milices privées communautaires à se tenir prêtes et la violence de la répression – au moins une dizaine de morts, dont certains après leur arrestation, et une vingtaine de disparus – ont également effrayé les manifestants. Le président Prabowo Subianto, dont on connaît le passé militaire et la triste réputation en matière de droits humains, a tenu un discours très martial, sur le thème de la patrie en danger, dénonçant les mafieux et les séditieux qui menaçaient la République. Tout a été fait pour casser la dynamique des manifestations par l’intimidation. Est-ce que cette réponse suffira à ramener durablement le calme ? On peut en douter, car c’est un mouvement très profond.
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