Depuis l’attaque israélienne contre l’Iran, les autorités de Téhéran ont pris des mesures pour limiter l’accès de leurs citoyens à Internet. A l’origine limitées, les perturbations se sont transformées en coupure totale depuis le 18 juin et l’Iran est aujourd’hui numériquement coupé du monde. Comment les autorités iraniennes ont-elles pu prendre cette mesure ?

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Deux spécialistes des réseaux, Frédérick Douzet, professeure à l’Institut français de géopolitique, et Kavé Salamatian, professeur à l’université Savoie – Mont-Blanc, ont répondu aux questions du Monde.

L’ampleur de cette coupure est-elle inédite ?

Frédérick Douzet : L’Iran avait déjà procédé à une coupure de cette ampleur en novembre 2019 pour réprimer les manifestations contre la hausse du prix de l’essence. L’objectif était la censure de l’information et le contrôle de la population. En revanche, c’est la première fois que l’Iran procède à une coupure de cette ampleur pour des raisons de sécurité nationale, afin de se défendre contre une attaque.

S’agit-il d’une coupure complète de l’Iran vers l’extérieur, de l’extérieur vers l’Iran, des deux ?

F. D. : La coupure permet d’isoler l’Internet iranien de l’Internet mondial, le trafic est donc coupé entre le réseau national et l’extérieur, dans les deux sens. L’objectif est d’empêcher toute coordination avec l’extérieur. En revanche, le réseau national iranien continue de fonctionner, en vase clos.

La coupure n’est toutefois pas étanche car on observe qu’une petite quantité de trafic continue à circuler entre le réseau interne et l’Internet mondial et que très probablement les acteurs étatiques et stratégiques ont toujours accès à l’Internet. Ceci est le résultat d’un travail de fond mené depuis plusieurs années afin d’accéder à un contrôle fin du trafic permettant de sélectionner, à l’échelle d’un quartier et même parfois d’un bloc de maisons, qui a accès à l’Internet et qui n’y a pas accès. Ainsi, le régime peut déconnecter les usagers tout en s’assurant que le trafic essentiel au fonctionnement de l’économie, comme le trafic bancaire, continue de circuler.

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