Le 30 octobre 2025, le Sénat italien approuvait en deuxième lecture un projet de loi susceptible d’affaiblir le pouvoir judiciaire par une séparation drastique des carrières entre magistrats du siège (chargés du jugement) et du parquet (instruction et accusation). Figurant parmi les objectifs prioritaires du gouvernement de coalition entre la droite et l’extrême droite dirigé par Giorgia Meloni, cette réforme reprend l’un des chevaux de bataille de Silvio Berlusconi, le magnat si prompt à fustiger « les toges rouges » qui avaient l’impudence de scruter l’origine de sa fortune.
Quelques dizaines de ses fidèles ont d’ailleurs aussitôt rendu hommage à l’ancien président du Conseil (condamné en cassation pour fraude fiscale) décédé en 2023, tandis que Giorgia Meloni, qui fut sa ministre de la jeunesse, célébrait un « but historique et un engagement concret maintenu en faveur des Italiens ». Parce qu’il modifie la Constitution et a recueilli moins des deux tiers des suffrages parlementaires, ce texte de loi devra en passer par un référendum confirmatif, prévu au printemps prochain, pour être définitivement adopté.
Censé garantir des procès plus équitables, il scinde la magistrature en deux corps professionnels – d’un côté les représentants du ministère public, de l’autre les juges –, et son Conseil supérieur en deux organes dont les mandataires ne seront plus élus par leurs pairs mais tirés au sort. Ce projet peut paraître secondaire, mais il revêt une grande portée symbolique en ce qu’il exprime une résolution à diviser – pour mieux régner – une magistrature réputée pour son autonomie, et à en contrôler une partie, les représentants du ministère public.
Retour aux années 1960
Cette tentative gouvernementale de mise sous tutelle des représentants du ministère public, sorte de retour à la voie hiérarchique qui prévalait jusqu’aux années 1960, s’inscrit dans une plus vaste offensive visant à neutraliser les contre-pouvoirs : loi atténuant la capacité de contrôle de la Cour des comptes, mesures entravant l’activité des journalistes d’investigation (par exemple avec la systématisation des plaintes en diffamation ou les lois bâillons…)
Il vous reste 64.02% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

