En Polynésie française comme ailleurs, les récifs coralliens sont menacés d’extinction.
Mais une équipe scientifique a découvert des « super coraux » capables de survivre dans des conditions extrêmes.
Des chercheurs français tentent d’en percer le secret, avec l’espoir de repeupler des zones endommagées.

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C’est un tout petit bout de terre au milieu de l’océan Pacifique, mais qui renferme un grand secret. Dans l’atoll polynésien de Tatakoto, au large de Tahiti, un récif corallien, récemment découvert à 30 mètres de fond, défie les lois de la nature telles que nous les connaissons. Contrairement aux coraux situés plus près de la surface, il ne présente aucun signe de stress ou de maladie. Une découverte « hors du commun » saluée par l’Unesco. L’explorateur Alexis Rosenfeld et son équipe, comme les scientifiques du CRIOBE, un laboratoire qui étudie les écosystèmes coralliens, n’imaginaient pas tomber sur un tel trésor en plongeant dans cette eau turquoise, en novembre dernier.  

TF1

« Ce lagon, c’est une ‘cocotte-minute’. Il est fermé. Il n’y a pas de passage entre l’eau lagunaire et l’eau océanique, et les températures atteignent parfois jusqu’à presque 35 degrés« , décrit le photographe dans le reportage du JT de TF1 qui accompagne cet article. Les coraux tropicaux vivent en symbiose avec des algues, les zooxanthelles. Ces micro-organismes fournissent au corail ses nutriments et sa couleur vive via la photosynthèse. Mais l’augmentation de la température de l’eau entraîne leur expulsion et conduit au dépérissement du corail. Depuis deux ans, sous l’effet du changement climatique (nouvelle fenêtre), le thermomètre des océans du globe s’affole, atteignant des niveaux inédits.

Tatakoto, c’est un coffre-fort biologique. C’est un bastion, le dernier pour protéger les récifs coralliens

L’explorateur Alexis Rosenfeld

Conséquence de cette surchauffe et de l’acidification des mers (nouvelle fenêtre), un épisode mondial de blanchissement, le quatrième depuis 1998 (nouvelle fenêtre), embrase l’Atlantique, l’océan Indien et le Pacifique. Si bien que 44 % des coraux d’eau chaude ont été placés sur la liste rouge (nouvelle fenêtre) de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), une véritable hécatombe. Mais alors, comment expliquer la résistance exceptionnelle des coraux de l’atoll de Tatakoto ? C’est ce que les chercheurs du CNRS vont tenter de découvrir : en étudiant ces coraux, mais aussi en les transplantant dans des zones où leurs congénères n’ont pas survécu. 

« L’objectif, c’est de savoir si ces coraux thermotolérants de Tatakoto sont capables de maintenir cette capacité de tolérance dans un autre lagon que leur environnement d’origine« , explique au micro de TF1 Laëtitia Hedouin, biologiste marine au CNRS et au CRIOBE. Des boutures ont déjà été installées à Moorea, un autre archipel. Si elles survivent là-bas, elles pourraient être utilisées à plus grande échelle pour restaurer les récifs endommagés. « Tatakoto, c’est un coffre-fort biologique. C’est un bastion, le dernier pour protéger les récifs coralliens. C’est un bel espoir, mais ce n’est pas une grande victoire. La grande victoire, c’est d’arriver à gérer notre climat, à baisser nos productions de gaz à effet de serre« , soutient l’explorateur Alexis Rosenfeld.

Environ un milliard de personnes dans le monde vivent à moins de 100 kilomètres de ces récifs et bénéficient, au moins indirectement, de leur présence. Ces « superorganismes animals » abritent une faune immense, font vivre des millions de pêcheurs, attirent une forte activité touristique, mais protègent aussi les littoraux des dégâts des tempêtes en servant de brise-lames. Cependant, 70 à 90% des coraux pourraient disparaître dans une planète 1,5 degré Celsius plus chaude qu’à l’ère préindustrielle, soit le climat attendu par les scientifiques au début des années 2030. Ce sont même 99% des coraux qui sont menacés par un réchauffement climatique de 2 degrés Celsius, limite fixée par l’Accord de Paris. 

Matthieu DELACHARLERY | Reportage : Matthieu PERROT, Philippe FONTALBA

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