D’après le Crif, depuis le 7 octobre 2023 – jour d’une attaque meurtrière sans précédent du Hamas en Israël – les actes antisémites ont bondi en France.
Ceux-ci s’invitent de plus en plus à l’école, notamment au collège et au lycée.
Dans la communauté juive de France, le malaise et la peur sont palpables.

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Les chiffres sont en hausse. D’après le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), les actes antisémites ont bondi depuis le 7 octobre 2023. En 2022, il en avait été enregistré 436. En 2023, ce nombre grimpait à 1.676, et même à 1.570 l’année suivante. 

Ce fléau touche de plus en plus de jeunes, comme un lycéen de 16 ans scolarisé à Paris dans un établissement privé, que nos journalistes ont rencontré. Après avoir posté en ligne un message pour défendre Israël face au Hamas, il a été menacé par des camarades de classe, comme on peut le voir dans le reportage du 20H de TF1 visible en tête de l’article. « J’étais dans les toilettes et j’ai entendu un groupe des personnes dire : ‘Les gars, il y a un juif dans les toilettes’. Ils m’ont alors dit ‘Sale juif, casse-toi ! On ne veut pas de toi ici’« , se souvient le jeune garçon, qui a pris peur après avoir découvert des croix gammées sur le tableau de sa salle de classe. Face à ces actes, l’établissement a réagi et les auteurs des faits ont été expulsés.

Il n’est pas question de rester en France et de dire à nos enfants de raser les murs

Muriel Ouaknine-Melki, avocate et présidente de l’Organisation juive européenne

Les massacres perpétrés par le Hamas le 7 octobre et la guerre à Gaza sont un puissant catalyseur de l’antisémitisme, qui s’invite de plus en plus à l’école, notamment au collège et au lycée. Muriel Ouaknine-Melki, avocate à Paris et présidente de l’Organisation juive européenne, défend actuellement un élève de 15 ans roué de coups parce que juif. « Le chef d’établissement ne pouvait plus garantir la sécurité de cet élève, qui était le seul élève juif de l’établissement. Il nous a expliqué qu’il fallait l’exfiltrer », explique l’avocate, qui organise deux fois par semaine des cours de self-défense pour les adolescents juifs. « Il n’est pas question de rester en France et de dire à nos enfants de raser les murs », soutient-elle. 

De son côté, Tony, un jeune juif pratiquant habitant en banlieue parisienne, préfère cacher sa religion. « Pourquoi devrais-je montrer quelque chose qui m’appartient personnellement en public ? Je me protège moi-même et je protège aussi les autres », explique-t-il, estimant qu’« alimenter les cycles de violence n’arrangera rien »

L’antisémitisme peut disparaître aujourd’hui parce que les Français ne sont pas antisémites

Patrick, habitant de Sarcelles

Alors que le conflit israélo-palestinien divise profondément la société française, un rapport parlementaire parle d’« antisémitisme d’atmosphère ». Mais pour la chercheuse Valérie Boussard, ce n’est pas le bon terme. « Ça donne l’impression qu’il s’agit de quelque chose d’impalpable, comme une odeur qui flotte dans l’air. Les étudiants et les écoliers disent : ‘Si personne ne me perçoit comme juif, alors je vais bien’. C’est là qu’on a un très gros problème », estime cette sociologue à l’Université Paris Nanterre et autrice d’une étude sur la montée de l’antisémitisme à l’école.

« L’antisémitisme peut disparaître aujourd’hui parce que les Français ne sont pas antisémites », soutient de son côté Patrick, un habitant de Sarcelles (Val-d’Oise), au nord de Paris, où un habitant sur cinq est membres de la communauté juive. Pour lui, pas question d’enlever sa kippa. « Si vous n’avez pas peur, je vous assure que vous avancez dans la vie et que rien ne peut vous arriver ». 

Karine, une infirmière proche de la retraite, n’est pas du même avis. Pour elle, la peur d’être agressée domine. Le climat anxiogène actuel bouleverse ses futurs projets. « On se dit qu’on va vendre notre maison et quitter la France pour Israël », explique-t-elle en assurant que ses deux frères qui vivent en Israël disent avoir peur pour elle. 

La justice en France condamne fermement les actes antisémites. Une injure peut entrainer pour son ou ses auteurs jusqu’à un an de prison, sept ans en cas de violence.

Rania HOBALLAH | Reportage : François-Xavier MENAGE et Olivier CRESTA

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