- Au total, au moins 21 drones russes ont fait intrusion dans l’espace aérien de la Pologne ce mercredi.
- Certains ont été abattus quand d’autres ont parcouru des centaines de kilomètres.
- De quoi interroger les capacités de l’alliance militaire occidentale.
Des drones russes violent l’espace aérien polonais
Des drones russes violent l’espace aérien polonais
On ne connait pas encore les intentions de Moscou. Mais une chose est certaine : l’intrusion de drones venus de Russie a permis de tester les défenses aériennes de l’Otan. Varsovie a déclaré ce mercredi 10 septembre que 19 « objets » étaient entrés dans son espace aérien lors d’une importante attaque contre l’Ukraine. Un bilan porté à 21 drones (nouvelle fenêtre)ce mercredi, dont 17 ont été récupérés, d’après le ministère polonais de l’Intérieur.
Pour faire face à la menace, des chasseurs polonais et néerlandais ont décollé, accompagnés d’avions de surveillance AWACS italiens et des avions de ravitaillement. Objectif : stopper la course des drones (nouvelle fenêtre). Toutefois, seuls trois d’entre eux ont été abattus, les autres atterrissant en pleine nature. Seule la toiture d’une maison et une voiture ont été endommagées par des débris dans l’est du pays.
Des drones les plus menaçants ont été « neutralisés »
Un bilan qui en a étonné plus d’un, surtout lorsqu’on sait que chaque nuit l’Ukraine abat des dizaines de drones (nouvelle fenêtre). Mais peut-on pour autant parler d’un échec ? Pas selon plusieurs sources militaires qui décrivent plutôt d’une décision stratégique. « Chaque fois que vous utilisez des avions pour vous défendre contre une attaque de drone comme celles-ci, vous devez faire des choix quant aux drones à intercepter et à ceux à ne pas intercepter »
, a ainsi argué Alexus Grynkewich (nouvelle fenêtre), commandant suprême des forces alliées en Europe pour l’Otan. Un tri à réaliser « en fonction du nombre d’avions que vous avez en vol »
et si « quelque chose se dirige vers un champ »
, a-t-il poursuivi, saluant les « bonnes décisions »
des équipages mobilisés. De fait, au total, 16 drones de type Gerbera ont été retrouvés quasi intacts dans des champs polonais, visiblement contraints à l’atterrissage, sans doute faute de carburant. Même analyse du côté français. Auprès de TF1info, une source militaire estime ainsi que l’intervention des systèmes de défense anti-aériens de l’Otan ont permis de « neutraliser les vecteurs les plus menaçants »
.
REPORTAGE – À l’école des drones militairesSource : JT 13h Semaine
Reste que de nombreux experts refusent de « considérer cette opération comme un succès majeur »
, à l’instar de Pierre Servent. Consultant défense TF1-LCI, il souligne tout de même qu’un drone « a volé 250 kilomètres à l’intérieur de l’espace polonais »
. S’il ne parle pas d’une défaite à proprement parler, il décrit un « échec par rapport à ce type de vecteur compliqué à intercepter »
, à savoir les drones.
Et pour cause, d’après Fabian Hinz (nouvelle fenêtre), chercheur à l’Institut international d’études stratégique, « les systèmes de défense aérienne occidentaux n’ont pas été conçus pour faire face à des systèmes de drones peu coûteux utilisés à grande échelle »
. Une analyse que partage Pierre Servent. La défense aérienne de l’Otan est plutôt calibrée « pour intercepter des avions de combat, des hélicoptères, des missiles de croisière ou balistique ».
Et d’illustrer son propos avec une comparaison : « On n’intercepte pas des mouches avec un marteau. »
Une image qu’Alexus Grynkewich (nouvelle fenêtre)est bien obligé de reconnaitre. Interrogé (nouvelle fenêtre)sur le coût particulièrement élevé de la réponse militaire déployée jeudi par rapport à celui des Gerbera, le commandant a confié qu’il y avait « absolument plus à faire »
en la matière, avec « des améliorations de l’armement qui nous permettent d’atteindre un coût par engagement plus faible »
.
L’exemple ukrainien
Une réalité qui semble avoir provoqué une prise de conscience du manque de structure militaire adéquate et rentable pour faire face à la menace des drones. Pour y faire face, notre interlocuteur plaide pour une coordination plus importante avec les Ukrainiens « afin d’intercepter ces aéronefs bien avant qu’il n’entre dans l’espace aérien de l’Union européenne »
. Un discours similaire à celui de la Lituanie, de l’Ukraine et de la Pologne. Dans une déclaration commune (nouvelle fenêtre), les trois ministres des Affaires étrangères ont reconnu la nécessité d’une « meilleure coordination et d’une coopération opérationnelle »
entre les différentes structures de défense aérienne pour « prévenir les conséquences des actions scandaleuses de la Russie »
.
Si la défense de l’Otan n’a pas failli à proprement parler, l’incursion de drones russes a tout de même montré les limites des solutions militaires de l’alliance, notamment financières. Reste désormais à tirer les leçons de cet incident, plaide Pierre Servent, en s’appuyant sur l’exemple de Kiev. « Très clairement, on a des trous dans la raquette et les seuls qui ont le fil, ce sont les Ukrainiens »
, conclut-il. D’après une source militaire proche du dossier citée par Reuters, des représentants militaires polonais doivent d’ailleurs se rendre en Ukraine pour s’entraîner à abattre des drones. En attendant, Moscou risque en tout cas de réitérer la démonstration. Car pour le Kremlin, « ce type d’opérations hybrides à faible coût produit un rendement politique et psychologique élevé »
, nous glisse une source militaire française, soulignant « l’incapacité »
des forces aériennes russes à réaliser une réelle « démonstration de force de grande envergure »
sur le front ukrainien.
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