Ce fut est l’un des premiers féminicides parmi les 118 recensés par le ministère de l’intérieur en 2022. L’ancien policier Arnaud Bonnefoy a été condamné, dans la nuit du jeudi 4 au vendredi 5 septembre, à vingt-deux ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de Paris, pour avoir tué par strangulation sa compagne, Amanda Glain, qui voulait le quitter.

Durant le procès, « j’ai été honnête », a déclaré Arnaud Bonnefoy avant que le jury ne délibère. « C’est un acte que je regretterai toute ma vie et qui est impardonnable. Mais j’ai dit la vérité sur cette affaire », a-t-il ajouté.

L’ex-gardien de la paix, aujourd’hui âgé de 33 ans, qui encourait la réclusion criminelle à perpétuité pour ce meurtre, a expliqué par sa « jalousie maladive », « tyrannique », « morbide » autant qu’« infondée », un acte « monstrueux », exercé avec « une violence, une force terrible ».

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L’étranglement est « le geste le plus mortifère de tous », « il a fini par le reconnaître très clairement », a affirmé, après l’annonce du verdict, le président de la cour, Marc Sommerer, qui a insisté sur les « conséquences dramatiquement irrévocables » du geste, « la mort d’une jeune femme de 28 ans ».

Une cavale de trois semaines

Le verdict a été accueilli dans le calme par Arnaud Bonnefoy comme par les proches d’Amanda Glain. Il est en deçà de ce qu’avait réclamé l’avocate générale Inès Bordet, qui avait requis vingt-huit ans de réclusion, assortis des deux tiers de période de sûreté, après avoir émis des doutes sur la sincérité des regrets de l’ex-policier.

Les jurés ont au contraire estimé que les déclarations d’Arnaud Bonnefoy étaient « corroborées » par les expertises, « cohérentes avec les constatations sur la scène de crime », qu’il s’en « est toujours tenu à la même version », qu’il avait « fait part de ses regrets », que sa « reconnaissance des faits » avait été jugée « sincère et authentique » et qu’il s’était engagé dans une démarche de soins en détention, a précisé Marc Sommerer. Le délai d’appel est de dix jours.

Le corps d’Amanda Glain, une créatrice de contenus digitaux de 28 ans, avait été retrouvé le 28 janvier 2022 dans l’appartement du nord-est parisien que louait Arnaud Bonnefoy, originaire de Marseille et alors en poste en Seine-Saint-Denis. Celui-ci s’était rendu au terme de trois semaines de cavale.

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Il a expliqué qu’elle venait de lui confirmer la fin de deux ans d’une relation empreinte de violence, d’insultes, de menaces de mort et ruinée par sa jalousie, décrivant Amanda Glain comme une « femme parfaitement équilibrée » dont il a affirmé qu’il l’aimait « profondément ».

Un mélange de « fureur, de colère, de haine, de peine »

Au lendemain d’une énième dispute dans le huis clos de son studio parisien de 18 m², portant comme souvent sur les publications de la jeune femme sur les réseaux sociaux, poursuit-il, Amanda Glain « se prépare pour aller travailler ». Il se réveille à son tour « en imaginant que la dispute a cessé ». Mais « elle me dit que je ne suis qu’un connard », qu’elle trouvera quelqu’un d’autre de mieux, raconte-t-il d’une voix qui devient un murmure. « Je me dis : “Pourquoi elle me dit toutes ces choses ? ”, “Pourquoi elle me déteste ? ” »

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Pendant qu’Amanda Glain se maquille, il se décrit « submergé » par « la peur de son départ, qu’elle m’abandonne », un mélange de « fureur, de colère, de haine, de peine ». Il se lève, va dans la salle de bains et l’étrangle.

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Dans la salle d’audience, le frère d’Amanda Glain, qui disait la veille avoir épuisé toutes ses larmes, écoute en pleurs. Marc Sommerer interroge Arnaud Bonnefoy : au moment où il étranglait Amanda Glain, avait-il l’intention de donner la mort ? L’accusé explique d’abord qu’il n’a « pas voulu » tuer sa compagne, qu’il était « déconnecté de la réalité ». Puis, dans un souffle, il lâche : « Oui, effectivement ».

« Je ne me suis pas rendu compte du comportement que j’ai eu pendant des années, qui ont détruit » deux compagnes précédentes, venues mercredi témoigner de sa violence, « et ont fini par tuer Amanda », dit l’ancien policier.

Il regrette aussi de n’avoir « pas eu le courage de suivre les traitements nécessaires ». Bras croisés, voix basse, souvent laconique dans ses réponses, il est souvent apparu cadenassé durant les trois jours de procès. « Qui avait la clé pour débloquer tout ça ? Peut-être vous ? », lui demande le président. L’accusé opine.

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Le Monde avec AFP

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